Fanfic sur Soul Reaver 2 (LoK)

Étant donné que je suis LE fan du forum concernant cette série, je me suis dit que je pouvais bien écrire là-dessus. Je vais transcrire ici, sous forme de fanfic, le jeu Soul Reaver 2 en entier. J'avertis que ça peut parfois devenir compliqué étant donné le scénario complexe.

Voilà pour ceux que ça intéresserait.

Liste des chapitres postés :

- Prologue
- Chapitre I : Rencontre
- Chapitre II : Épées et Convergences
- Chapitre III : La gloire passée de Nosgoth
- Chapitre IV : La corruption des Colonnes

Prologue


Raziel poussa les portes et il fut submergé par la lumière que dégageait l’endroit. En entrant, les portes se refermèrent d’elles-mêmes, mais le vampire des âmes ne le remarqua même pas car ce qu’il voyait était magnifique : une grande salle circulaire, divisée en trois étages, illuminée par la magie et par de simples lanternes. Ces étages comportaient tous plusieurs mécanismes avec plusieurs symboles et un cadran. Il y avait également un escalier qui menait à un portail à l’autre bout de la pièce. Mais le plus frappant fut le plafond étoilé et le mécanisme accroché à celui-ci : c’était une sphère, avec trois bras, qui tournait sur elle-même. Aussi, comme la Terre tourne autour du Soleil, trois autres petites sphères tournaient autour du mécanisme, comme si c’était le centre de gravité. Raziel fut arraché à ses contemplations, car il entendit une voix.

- Enfin…! Je dois dire que je suis très déçu. Je pensais que tu serais plus rapide. Dis-moi… Le meurtre de tes frères ne te tourmente-t-il pas?

Kain se montra et fixa Raziel : il s’était caché derrière un mur au troisième étage.

- Et ma condamnation te laisse-t-elle en paix? répliqua Raziel en descendant les escaliers devant lui.

Kain se détourna et se dirigea vers l’un des cadrans tout en riant. Puis, il reprit la parole.

- L'éternité est implacable, Raziel. Lorsque je découvris ces lieux il y a des siècles, j'ignorais la puissance réelle du savoir.

Kain enclencha le cadran sur l’un des nombreux symboles. Ce dernier s’illumina et le mécanisme au plafond s’activa, tournant encore plus vite.

- Connaître le futur Raziel, continua Kain tout en marchant, contempler ses sentes et ses chemins tortueux s'étendre vers l'infini… En tant qu'homme, je n'aurais pu résister à une telle vision… Mais nous sommes tous deux devenus tellement plus… Ne ressens-tu pas de toute ton âme que nous sommes les égaux des dieux?

Kain, qui s’était arrêté devant les escaliers et le portail, joua avec ses pouvoirs en créant un éclair mauvâtre entre ses mains. Le terme dieu semblait lui plaire… Puis, tout en continuant de parler, il descendit les escaliers jusqu’au deuxième étage et se dirigea vers un autre mécanisme

- Et que nous sommes indissociables? Tant que l'un de nous survit, nous sommes une infinité… Notre histoire était écrite, Raziel. Moébius prédit la mienne il y a des siècles de cela. Nous jouons un rôle octroyé par le destin. Le libre arbitre n’est qu’illusion.

Kain activa le second cadran, donnant ainsi plus d’énergie au mécanisme central. Raziel, qui avait écouté Kain jusqu’au bout, prit la parole sur un autre sujet.

- J'ai trouvé les tombes des Séraphéens, Kain! Comment as-tu pu souiller ainsi des prêtres, en faire des monstres?

Raziel, tout en disant les derniers mots, sauta sur un pilier et bondit vers Kain dans l’intention de l’attaquer. Mais l’empereur ne se laissa pas faire et attrapa son ancien lieutenant par le cou.

- Comment y résister? demanda Kain. Il faut savoir rester proche de ses amis Raziel, et plus encore de ses ennemis!

Kain balança Raziel au sol, le renvoyant d’où il était venus. Puis, le vampire sauta en bas pour rejoindre son agresseur qui commençait à se relever de sa chute.

- Qui d'autres pour me servir que ceux dont les passions avaient transcendé les notions de bien et de mal?

Raziel, honteux de s’être fait si facilement piégé par Kain, se retourna vers son ancien maître, lui faisant face. La haine brûlait dans les yeux blancs du vampire des âmes.

- Les Séraphéens étaient des rédempteurs, ils défendaient Nosgoth du mal que nous incarnons! J'ai ouvert les yeux Kain! Il n'y a nulle noblesse dans la non-vie que tu m'as imposée!

Raziel attaqua Kain et réussit non seulement à le frapper trois fois, mais aussi à le bloquer contre le mur, un bras sur la gorge.

- Tu as peut être découvert ton passé dit Kain en prenant le bras de Raziel, mais tu n'y entends rien. Crois-tu que les Séraphéens étaient nobles et altruistes?

Kain se dégagea brutalement de l’emprise de Raziel et envoya voler son ancien lieutenant au travers de la pièce grâce à un sort de télékinésie. Le vampire des âmes heurta violemment le mur qui fut endommagé sous l’impact. Kain se mit à rire devant la pathétique situation de Raziel et devant son aveuglement.

- Tu es si naïf dit Kain. Leurs intentions étaient similaires aux nôtres.

Kain activa le troisième et dernier cadran, mettant totalement en marche le mécanisme central. Ce dernier se mit à tourner très vite et à lancer des éclairs d’énergies à travers la salle. Puis, un éclair alla toucher le symbole qui se trouvait juste au-dessus du portail. Ce dernier, sombre et inactif depuis le début, recracha ses ténèbres et laissa place à un tourbillon de lumière. Kain, satisfait, se retourna vers Raziel qui se relevait.

- J'étais à ta merci, Raziel.

Kain se téléporta devant le portail.

- Mais cette histoire doit s'achever autrement en d'autres lieux continua-t-il. Le destin nous réserve encore quelques surprises.

Kain entra dans le portail, disparaissant dans le tourbillon lumineux. Raziel, relevé, arriva devant le vortex en quelques bonds. Méfiant, il invoqua la Soul Reaver, son arme symbiotique, et sauta dans le passage, entendant les dernières paroles d’Ariel dans sa tête : << Sois prudent Raziel, la rage rend aveugle et vulnérable aux pièges du destin. >> Le vampire eut une sensation de distorsion et il se surprit à flotter dans les airs. Il atterrit lentement sur un sol vitré, la Reaver encore au bras. Un personnage sortit du brouillard coloré et se présenta à lui.

- Raziel… Rédempteur et Destructeur. Pion et Messie. Bienvenue, âme perdue dans les âges, rencontre ta destinée.

À suivre

Rencontre


Raziel hésitait à faire un seul mouvement tant il ne croyait pas ce que lui montraient ses yeux. Le brouillard de la pièce c’était dissipé, révélant une salle circulaire aux machines complexes. Mais ce qui frappa le vampire des âmes fut le personnage qui se trouvait devant lui. Ce dernier, réputé pour être mort il y a des siècles, le regardait avec un mélange de curiosité et de peur. L’humain, car ça en était un, semblait vieux et faible. Il était habillé d’une toge à capuche et s’appuyait sur un bâton sur lequel se trouvait un orbe. Toutefois, Raziel reconnu l’humain grâce au mythique symbole qu’il avait dans le front : un huit, exprimant l’éternité. Hésitant, ce dernier prit finalement la parole.

- «Où suis-je?» est la question rituelle. Mais «quand» serait plus approprié dans ta situation.

Se souvenant enfin à qui il avait affaire, Raziel retrouva ses esprits et brandit son arme symbiotique. En réaction à ce mouvement agressif, l’orbe du bâton s’activa et la Soul Reaver disparue, laissant Raziel confus et sans arme.

- Soit, vieux fou dit Raziel, mes mains se chargeront du fardeau de ta vie.

Subitement, Raziel fonça sur l’homme et le plaqua au mur, serrant sa gorge entre ses doigts trifides. Paralysé, l’humain ne put que se soumettre, imaginant les pires choses que agresseur pouvait lui faire. Néanmoins, il réussit à articuler et à se faire entendre.

- Cela ne devait pas se passer ainsi! Cet orbe neutralise nos ennemis vampiriques, les laissant nus et faibles comme des nouveau-nés. Étrangement il semble avoir les mêmes effets sur l’arme insolite que tu arbores. Mais tu dois me croire, mes intentions sont pures.

Raziel resserra sa prise.

- Inutile de feindre, Moébius. Je sais Qui et Ce que tu es en vérité. Je devrais te tuer sur-le-champ…

Moébius éclata de rire, semblant plus rassuré.

- Peut-être le devrais-tu mon garçon… Mais tu n’en fera rien!
- En es-tu si sûr, Moébius?
- L’écheveau du temps n’échappe à son maître, Raziel. Non, tu ne me tueras point. Cet honneur revient à ton créateur, Kain, et trente années nous en séparent.

Exaspéré, Raziel soupira et relâcha Moébius. Il comprit maintenant qu’il avait fait un énorme bond dans le passé et qu’il était revenu à l’époque de la naissance de Kain.

- Hmm… Vous êtes tous deux faits du même bois, le fatalisme est votre sève.

Moébius en profita pour réajuster ses vêtements et reprendre son souffle.

- La mort a toujours le dernier mot, Raziel, c'est une simple question de temps.

Tout en parlant, Moébius se retourna et commença à monter les escaliers menant vers la seule porte de la pièce. Raziel se rendit alors compte d’une chose qu’il n’avait pas remarqué avant.

- Comment sais-tu mon nom? Nous ne nous sommes jamais rencontrés…

La porte s’ouvrit devant Moébius et ce dernier en sortit tout en répondant au vampire des âmes.

- Détrompe-toi, Raziel. Je te connais même très bien… Et mon cœur est lourd de voir combien Kain t'as abusé.

Raziel suivit l’humain dans l’autre pièce tandis que ce dernier parlait.

- Je t'ai connu comme frère séraphéen, Raziel. Nous étions proches alors.
- Oooh! À d'autres…
- Heureusement le coupa Moébius, tu peux être mon allié sans pour autant m’apprécier.

La porte se referma d’elle-même derrière Raziel et ce dernier pénétra dans une autre salle circulaire, mais beaucoup plus vaste. Il reconnut l’architecture humaine, mais celle qu’il avait devant les yeux était plus ancienne encore que l’époque où il se trouvait.

- Est-ce la forteresse de l'ordre séraphéen? demanda Raziel.
- Certes répondit Moébius, mais le soleil de sa gloire s'est depuis longtemps éteint. Sa lumière est désormais… lugubre et moins raffinée. Mon armée de mercenaires occupe à présent ses murs. Notre humble croisade honore la mémoire des vertueux Séraphéens.

Tandis que le Voyageur du Temps parlait, Raziel continuait à observer l’endroit. Son regard s’arrêta sur deux choses. La première était les bannières accrochées aux murs portant le symbole de Moébius, confirmant ses dires à propos de sa croisade. La seconde était la présence de cinq grandes peintures. Toutes comportaient une similarité : la présence d’un vampire à la peau verte, au regard meurtrier et aux grandes oreilles.

- Est-ce là Vorador le vampire ? demanda Raziel une fois de plus.
- Oui, le fléau du cercle. Dépravé, décadent, incarnation ultime de cette race dégénérée. Il massacra six de mes frères gardiens, pétrifiés d'effroi, dans cette pièce même.

Les images montraient justement les six gardiens, représentés avec vénération, entrain de se faire assassiner par Vorador. L’art des Séraphéens avait toujours été très distinctif entre leurs alliés et leurs ennemis.

- Et bien sûr tu as survécu dit Raziel en continuant de contempler les fresques.
- Trois d'entre nous furent épargnés dit Moébius, mais le cercle ne s'en releva pas…
- Comme c’est pratique!

Raziel se retourna vers Moébius et lui lança un regard de suspicion.

- Pardonne moi si je n’écoute pas religieusement ton prêche. Ta réputation d’apôtre de la duplicité n’est plus à faire.

Moébius se tenait à coté d’un petit bassin au centre de la salle et regardait Raziel avec frustration. Sa voix, aussi, montrait à quel point il détestait être jugé par rapport aux dires des autres.

- Et qui l'a donc bâtie, cette réputation ? Ce félon de Kain ? Celui qui t'a trahi, qui a détruit ton être ? Notre ennemi commun ? Juge donc l'auteur de tes sermons avant de les réciter ! Oublions alors notre ancienne fraternité…

Moébius se radoucit brutalement, préférant ne pas brusquer son visiteur du futur et pour lui proposer un pacte.

- Mais considère une alliance basée sur un but commun : nous voulons tous deux la perte de Kain. Et je peux t'y aider.
- Non s’opposa Raziel, reste en dehors de cela, vieil homme. Je sais combien tu peux être nocif, mais l'ampleur de cette tâche dépasse tes compétences.

Le Gardien du Temps ne sembla aucunement blessé par cette remarque. Au contraire, il se mit à sourire avec confiance.

- Tu me sous-estime, Raziel. Laisse moi t’éclairer…

Activant l’orbe de son bâton, Moébius alluma les chandelles placées sur le bord du bassin et se pencha sur celui-ci, invitant Raziel à faire de même. L’eau montrait une vision de l’édifice sacré de Nosgoth, les Colonnes, et Kain en leur centre.

- En ce moment même, Kain t'attend, ignorant que je t'ai arraché au cours du temps et amené ici, jusqu'à moi. Vois comment il rôde autour des Colonnes qu'il est destiné à profaner… Vois comment il se croit hors d'atteinte de ta vengeance.
- Les Colonnes se dressent encore, en ce temps? demanda Raziel, surpris de voir l’édifice dans sa pureté même.
- Oui Raziel dit Moébius sur un ton rassurant et implorant à la fois, elles sont le symbole des forces divines qui préservent la vie en ce monde. Ceux qui, comme nous, gardent les Colonnes, servent l'équilibre dont Kain deviendra fatalement le point d'appui, l'instable pivot. Tu as déjà souffert du désert stérile dont Kain, dans son choix égoïste, sera le géniteur. Son existence même est une gangrène pour ce monde. Tant qu'il vivra, Nosgoth sera en danger.

Les images disparurent subitement, redevenant simplement de l’eau. Le Voyageur du Temps continua à parler pour mettre Raziel en garde.

- Il est possible que ton humanité soit à jamais perdue, Raziel… Mais tu peux renouer avec l'essence de l'humanité, la majesté de ton héritage séraphéen. Va, Raziel, et met un terme à cette agonie. Il te faudra au préalable quitter cette forteresse, une tâche dans laquelle je ne puis te secourir, mes soldats ne comprendraient pas l'objet de ta présence ici : ils vont essayer de te tuer. Mais tu n'as rien à craindre, ils ne font pas le poids. Tente de les épargner, mais ce qui doit être sera. La roue de l'histoire broie toujours quelques martyrs…

Sur ces derniers mots, Moébius disparut, laissant Raziel seul dans cette époque qui lui était inconnue. Assimilant les informations que le Gardien lui avait donné, le vampire des âmes nota la présence d’un autre engin temporel semblable à celui qu’il avait prit pour arriver ici, à une seule exception près : il y avait un cristal au-dessus de son ouverture. Comprenant que ce cristal servait à activer la porte, Raziel sût qu’il n’avait pas les moyens, pour l’instant, de l’ouvrir. Il prit donc la seule direction qui lui était possible : une autre porte menant dans un couloir.

À suivre

Épées et Convergences


- Aux armes!

Deux chasseurs de vampires se jetèrent sur Raziel, pensant pouvoir ne faire qu’une bouchée de l’ancien lieutenant de Kain. Même privé de son arme symbiotique, ce dernier savait comment cela se terminerait. Il esquiva la première attaque et arracha la jugulaire de son assaillant au passage, le tuant sur le coup. Le corps de l’humain s’effondra sur le sol, figeant son allié sur place. Ce court moment d’hésitation suffit à Raziel pour l’empoigner par la gorge et le lancer sur un pic. Le chasseur de vampire s’empala sur celui-ci et mourut instantanément. Raziel, voyant leurs fragiles âmes s’envoler de leurs corps, étira le foulard cachant son horrible visage et les dévora, les envoyant dans la Roue du Destin, aussi connue sous le nom de Cycle de la Naissance, de la Mort et de la Renaissance.

Le trois fois né continua son chemin à travers la forteresse en observant ce qui l’entourait. Les murs avaient vraisemblablement étés restaurés afin de servir de bastion pour les sbires de Moébius. Les vitraux, représentant les saints guerriers séraphéens d’autrefois, avaient aussi étés restaurés et laissaient même passer la lumière du soleil à l’intérieur. Les bannières de la croisade étaient accrochées un peu partout, grugées par les chauve-souris et les rats qui pullulaient. Et tandis que Raziel marchait, tuant les humains qu’il rencontrait et détruisant leurs dépôts d’armes, il ne put s’empêcher d’être ému par la beauté de son héritage séraphéen, celui que Kain avait volontairement salit pour faire de lui, ainsi que de ses frères, les lieutenants qui allaient construirent son empire.

- Saisissez-vous de lui!

Raziel fut surprit de voir trois chasseurs de vampires se jeter sur lui alors qu’il contemplait les vestiges de son passé. Ils se trouvaient tous dans une cour donnant sur l’extérieur et Raziel put voir, pour la première fois, le ciel de cette époque pure. Rapidement, il mit les humains hors d’état de nuire et poursuivit sa route vers le seul passage qui s’offrait à lui. Une herse se dressa sur sa route, lui bloquant le passage. Pour un humain, cet obstacle aurait été suffisant pour l’arrêter, mais pour lui, ce n’était qu’un léger contretemps. Se concentrant, le vampire des âmes se débarrassa de son enveloppe physique et se matérialisa dans la sphère spectrale, ou monde des morts et des esprits. Cette sphère était la même que le monde des vivants, mais avec néanmoins plusieurs différences. Les murs, droits et clairs, étaient désormais sombres et tordus. Rien ne bougeait, pas même les flammes des chandelles ou bien les bannières flottant dans le vent. C’était comme si le temps était mort. Plus rien ne bougeait, sauf lui et les âmes qui flottaient autour. Raziel, désormais devenu un esprit, traversa la herse tel un fantôme et continua sa route. Par chance, un portail inter-dimensionnel se trouvait sur son chemin, il put donc l’utiliser, en se concentrant à nouveau, pour se créer un corps physique et revenir dans le monde des vivants. Et là, une surprise l’attendait : son arme symbiotique, la Soul Reaver, était revenue à son bras. Sentant la force de son épée revenir peu à peu, Raziel sut que Moébius, avec son bâton, détenait un avantage immense sur les vampires. Si les effets étaient aussi grands sur eux que sur l’épée, il était donc normale que la croisade soit aussi dévastatrice. Apparemment, son passage dans la sphère spectrale avait conjurer le sort de l’orbe…

Raziel observa le lieu où il se trouvait : une chapelle d’architecture gothique dans laquelle plusieurs chasseurs de vampire patrouillaient. Il n’avait qu’un seul choix : étant donné que la porte de l’entrée étaient sévèrement gardée et, qui plus est, verrouillée à l’aide d’une herse, Raziel ne put que se diriger vers la nef où il espérait trouver une autre sortie. Évitant soigneusement les patrouilles, le vampire atteignit sa destination et y entra. Dès lors, il fut envahis par une étrange sensation : un sentiment indescriptible de discontinuité, un vertige inexplicable, comme si la réalité toute entière se contractait sans arrêt autour de lui. Et à chaque pas qui le rapprochait du cœur de la nef, Raziel sentait son malaise se décupler. Son environnement semblait, comme dans la sphère spectrale, prendre des proportions impossibles : il s’étirait puis rapetissait indéfiniment.

Raziel, en s’approchant, comprit qu’il se tenait devant la sépulture de William le Juste, roi et martyr, catalyseur de la croisade de Moébius. Le vitrail peint juste au-dessus représentaient le roi, présenté avec divination, et le jeune Kain, son assassin, tous deux armés d’une Soul Reaver. Se remémorant le parcours du vampire, Raziel se souvint comment Moébius l’avait contraint à plonger dans le passé afin de tuer William et ainsi installer dans le cœur des habitants de Nosgoth une haine viscérale des vampires. Et là, sur le tombeau du roi, reposait l’origine de la sensation étrange de l’endroit : la Soul Reaver matérielle, brisée dans la bataille entre William et Kain. Raziel, autrefois, aurait pu croire que c’était impossible que cette épée puisse se briser, mais il avait lui-même vécut l’expérience : Kain avait complètement brisée l’épée sur son dos lors de l’un de leurs affrontements. L’esprit de la lame s’attacha ensuite à son bras et devint son arme symbiotique : la Soul Reaver spectrale.

Caressant le crâne vampirique de l’épée, qui servait à relier le manche doré et la lame serpentine, Raziel sentit son épée symbiotique entrer en contact avec son antique incarnation matérielle. Voyant la lame spectrale s’enrouler autour de sa sœur d’acier, le vampire des âmes ressentis l’esprit léthargique de la Soul Reaver s’éveiller et son être entier fut envahit par un seul et unique sentiment : celui de la colère face à un si long exil. Aussitôt, Raziel sentit son âme se faire grugée par l’épée, devenant de plus en plus et perdant de plus en plus le contrôle. À genoux à cause du manque d’énergie, il ne vit pas la lame de l’épée se réparer et ne remarqua pas non plus que l’effet de distorsion de la salle avait disparut.

Au bord de la mort, Raziel ressentit l’étreinte de la Reaver se relâcher et il put retrouver le contrôle total de son corps. Bondissant vers l’arrière, la lame matérielle encore à la main, Raziel se rendit compte que la lame spectrale n’était plus son arme symbiotique, mais bien une entité indépendante qui était prête à se battre pour le contrôle du corps du vampire. Ce n’est qu’à ce moment que Raziel entendit des bruits de pas derrière lui… Et il les reconnut. Se tournant brusquement, il se fit menaçant.

- Que m'as-tu fait, Moébius? Est-ce là un de tes pièges?

Le Gardien du Temps, car c’était bien lui, regardait Raziel avec frayeur. Cette fois-là, il n’avait pas son bâton, il était donc à la merci du vampire. Se protégeant du mieux qu’il le pouvait, Moébius répondit à Raziel.

- Mon piège? Tu oublies que c'est Kain, et non moi, qui t'amena en ces lieux? Pendant que tu maudis la seule âme de Nosgoth prête à te guider et t'assister, Kain se rit de ta témérité et de ton désarroi.
- Ces lames, nouées dans une sinistre étreinte, ont inspiré la terreur dans le cœur de créatures bien plus… solides que toi, vieil homme. Réunies, je n'ose imaginer leur effet sur le fragile écrin de ton âme.

Moébius, complètement effrayé, joignit ses deux mains et implora l’ancien séraphéen.

- Raziel, je te supplie de retenir ta main. Jamais je ne le voulu. Je n'ai cherché qu'à t'aider dans ton juste combat.
- Tu trembles, Moébius. Où donc est passée ta morgue? Tu as commis une fatale erreur en abandonnant ton si précieux bâton. Serait-il l'unique source de ton courage?

L’humain, complètement effrayé, posa une main suppliante afin de faire comprendre à Raziel qu’il allait commettre une erreur.

- Écoute-moi Raziel. Mesure la portée de tes actes ! J'ai pris de gros risques en paraissant devant toi, sans défense, afin de prouver mes bonnes intentions. S'il reste une once du séraphéen que tu fus, tu ne me tueras pas. Tandis que tu me toises, ton ennemi s'échappe!

Raziel agrippa le bras de Moébius et le força à se mettre à genoux, impuissant.

- N'aie de crainte pour Kain, vieil homme. Il te suivra bientôt aux enfers. Tu avais raison, la mort a toujours le dernier mot…
- Soit… La roue du destin l'exige.

Le vampire des âmes stoppa le mouvement destiné à mettre fin aux derniers instants du Gardien du Temps.

- Qu'as-tu dit? demanda Raziel.

Moébius releva la tête, désormais plus confiant.

- La roue du destin : L'inexorable cycle de morts et de réincarnations auxquels sont soumis tous les êtres vivants. Nous servons le même dieu, Raziel. M'abattre serait priver Dieu de son plus fidèle serviteur, et je crains que même toi ne puisses t'y risquer.
- Tes petits jeux commencent à me lasser Moébius soupira Raziel. Pour l'heure, je me contenterai de ta crainte, Kain m'attend.

Jetant la Soul Reaver au sol et poussant Moébius en dehors de son passage, Raziel désirait sortir de la nef, mais Moébius lui parla encore.

- Va Raziel, poursuis Kain et détruis-le au nom du Dieu unique que nous servons tous deux… Prêtre séraphéen tu fus. Assassiné, profané, banni et ressuscité, tu es désormais son plus puissant instrument de châtiment et de Rédemption.

Raziel se retourna, exaspéré.

- Ma vengeance est une motivation suffisante, Moébius.

Lorsque le vampire des âmes fut partit, Moébius poussa un grand soupir de soulagement. Un sourire sournois et malicieux ornait son visage. Tandis qu’il remettait l’épée à sa place d’origine, il ne put s’empêcher de penser à voix haute.

- Hé bien, il s'en est fallu de peu, mon petit démon bleu. Mais je puis te promettre que c'était la première et la dernière fois que tu m'avais en ta merci.

À suivre

La gloire passée de Nosgoth


Raziel avait continué son chemin, révoquant la Soul Reaver, et s’était arrêté un peu plus loin devant une autre fresque peinte. Il reconnut le légendaire Janos Audron, le plus ancien vampire censé avoir foulé le sol de Nosgoth. Les légendes juraient, qu'il vivait au faîte des montagnes hyperboréennes du pays et qu'il terrorisait les habitants des vallées. Son règne de terreur s'acheva, quand les Séraphéens l'acculèrent et arrachèrent son cœur noir encore palpitant. Ce cœur des ténèbres devint une véritable relique réputée avoir le pouvoir de restaurer la non-vie vampirique. Les séraphéens la mirent donc sous bonne garde, afin d'éviter qu'il ne tombe entre les mains de leurs ennemis jurés. Mais le vampire des âmes était songeur : Janos Audron était-il aussi horrible tel que montré ici? Où bien était-ce la vision un artiste Séraphéen voulant grandir ses pairs par la diabolisation de leur ennemi? Détournant son regard de l’œuvre, Raziel remarqua la présence d’une porte à la droite de la nef. Il s’empressa de l’emprunter et continua son chemin sans opposition à travers le couloir.

La pièce suivante le surprit : octogonale, décorée telle un monument dédié à des figures du passé. En cela, le vampire des âmes n’avait pas tort.

- Le cycle infernal de l’histoire murmura Raziel pour lui-même.

Sur le sol était représenté un serpent se mangeant la queue : l’Ourobouros, signe de l’éternité. D’autres œuvres, au nombre de six, étaient placées à différents endroits : cinq peintures et une statue. Sur chaque œuvres étaient inscrit le nom de chacune des personnes à qui elle était dédié. Raziel put lire les noms de Melchiah, Zephon, Rahab, Dumah, Turel et… le sien. Cette chapelle, il le réalisa vite, était consacrée à ses frères et à son alter-ego séraphéen. Une sépulture de martyrs profanée par Kain et son don maléfique… Raziel pu contempler, pour la première fois, son alter-ego séraphéen, immortalisé autour de ses frères. Ne pouvant s’empêcher de penser à la personne noble et pure qu’il avait dû être, un sentiment de puissante blessure, de perte et de trahison l’envahit. Alors que ce sentiment menaçait de le submerger, il ne pensait qu’à une chose : débusquer Kain et l’annihiler.

- Tu vas mourir vampire!

Tandis qu’il contemplait son passé, Raziel n’avait pas entendu arriver deux chasseurs de vampires armés de lances. Le vampire profita de l’occasion pour tester l’efficacité de sa nouvelle épée. Invoquant la lame d’énergie, Raziel fonça sur le premier de ses ennemis. La première attaque provoqua la chute du chasseur de vampire et la seconde, sa mort. Raziel se prépara à dévorer l’âme, mais cette dernière se dirigea immédiatement vers son épée. La lame dévora l’âme à sa place, devenant ainsi plus dangereuse pour ses adversaires, mais également pour Raziel. Si la Soul Reaver devenait trop gourmande, c’était lui qui allait finir par être dévorer.

Ce moment de surprise laissa le temps à l’autre chasseur de frapper Raziel dans le dos avec un coup latéral. La lance créa une profonde blessure dans le dos du vampire, aspergeant le sol de son sang bleuâtre. Mais, à la surprise de l’humain, la peau se referma instantanément. Néanmoins, Raziel avait perdu une partie du lien qu’il partageait avec son corps matériel : s’il devait subir trop de blessures, le lien disparaîtrait et il serait renvoyé au monde des morts. Ne perdant pas de temps, Raziel révoqua la Soul Reaver, s’empara de la lance du premier humain et empala le deuxième sur celle-ci. S’étouffant avec son propre sang, l’humain suffoqua et tomba raide mort. Son âme s’envola et Raziel la dévora, lui redonnant la partie du lien qu’il avait perdue.

Suite à cela, le vampire des âmes chercha une sortie, mais la seule issue était des escaliers en colimaçon. S’y engageant, il déboucha sur l’étage au-dessus. À partir de là, une seule porte s’offrait à lui. Las de ce labyrinthe sans fin, Raziel ne put qu’avancer, espérant trouver au bout une sortie vers le monde extérieur. Suivant le couloir, Raziel arriva devant une autre porte, plus massive que les autres. L’ouvrant, il fut éblouis non par le soleil, mais par ce qu’il vis.

Il était enfin à l’extérieur sur un balcon situé au-dessus d’un bassin. Raziel voyait enfin Nosgoth dans son innocence la plus pure : des étendues gorgées de vie et de luxuriance. Le ciel était clair comparé a l’autre d’avant, emplis de fumée servant à cacher le soleil. La végétation était partout comparé au monde désertique qu’il avait connut. Raziel sut alors qu’il n’avait connu que la rude carcasse de ce monde, l’odieux reflet d’un Nosgoth dont l’exubérante vigueur avait été drainée par le vampirique empire de Kain. Ce dernier avait choisi de sacrifier le pays pour préserver sa terne vie et sa vertigineuse ambition. La résolution de Raziel n’en devint que plus forte. Sachant que les Colonnes se trouvaient au nord-ouest de sa position et que Kain devait assurément s’y trouver, Raziel décida de ne pas le décevoir et se mit en route.

N’ayant guère d’autre choix, Raziel sauta dans le bassin et nagea jusqu’à une corniche non loin. L’eau, même à cette période, semblait pure comparée à celle de l’époque de l’empire de Kain qui, elle, était jaunâtre, brouillée et sale. Sortant de l’eau, Raziel nota la présence d’une manivelle et d’un symbole ésotérique posée sur un poteau. En approchant, une parcelle de l’énergie de la Soul Reaver s’y engagea et illumina le symbole tel un phare. Raziel sut alors que cet objet lui servirait de guide si jamais, dans le monde spectral, il se retrouvait perdu, porté par les vents et sans énergie. Se retournant ensuite vers la manivelle, le trois fois né l’activa, espérant que cette action lui donnerait une sortie à l’extérieure de la forteresse. Son souhait se réalisa lorsqu’il entendit un grondement venant de l’eau : une porte massive venait de s’ouvrir, permettant ainsi à Raziel de l’emprunter et de sortir une bonne fois pour toute du château. Juste avant de retourner dans l’eau, Raziel nota la présence d’une porte à l’autre bout du bassin : grande, dorée avec deux symboles étranges dessus. Il ne s’en préoccupa pas : sa quête pour Kain lui démangeait l’esprit.

Une fois de l’autre côté du mur, Raziel revint à la surface et se dirigea vers le seul endroit où il pouvait sortir de l’eau. Une fois fait, il se retrouva devant deux chemins : l’un menant vers les Colonnes et l’autre vers un étrange obélisque. Curieux, Raziel s’approcha de ce dernier et y posa sa main. Semblant étrangement accordé à son esprit, le vampire des âmes compris que cet antique monument faisait une copie de son âme. À partir de là, il pourrait venir se reposer, s’il en avait besoin, et reprendre sa quête plus tard. Revenant sur son chemin, Raziel jeta un dernier coup d’œil à l’immense forteresse séraphéenne. Il comprit alors l’inexorabilité de son retour prochain. Y pénétrer serait probablement plus dur que d’en sortir étant donné que le chemin par lequel il était sortit était désormais hors de portée. Il n’aurait donc pas le choix de forcer les immenses portes placées directement dans le lac. Toutefois, il vit également qu’elles étaient verrouillées de la même façon que l’engin temporel du château : une cristal rosâtre, au-dessus des portes, brillait d’une lumière étrange. Décidant d’y penser plus tard, Raziel se retourna et commença son voyage vers les Colonnes.

Sur son chemin, Raziel ne rencontrait que des chasseurs de vampire trop confiant en eux, accompagnés de chiens de chasse. Ces derniers étaient particulièrement utiles aux humains puisqu’ils sentaient le danger beaucoup plus loin et beaucoup plus facilement qu’eux. Néanmoins, ils ne posaient jamais de réels problèmes et s’ils devaient y en avoir, leurs âmes répareraient les dégâts. Toutefois, alors que son voyage le rapprochait des Colonnes, le vampire des âmes notaient les fréquentes apparitions de vampires empalés, brûlés ou bien simplement décapités. Ces vampires n’avaient rien de commun avec les loups démoniaques que Raziel avait connut dans l’empire de Kain. Semblables à des humains, ils ne semblaient pas être les mêmes prédateurs que ceux de l’empire. Ils semblaient faibles et faisait office de gibier facile pour les humains. Même si Raziel voulait enrayer la menace vampirique, il n’approuvait en rien les actes de Moébius avec sa croisade : c’était une lâche misa à mort.

Tandis que son esprit analysait son environnement, Raziel avançait en massacrant les humains sur son passage. La forêt autour de lui était dense et se resserrait toujours plus a chaque pas qu’il faisait. Il arriva finalement face à une grande porte à double battant, érigée par les Séraphéens il y a longtemps. Elle bloquait l’accès aux Colonnes et était gardée par plusieurs chasseurs de vampire. N’ayant pas le choix, Raziel invoqua la Soul Reaver et se jeta dans la mêlée. Rien ne l’empêcherait d’atteindre le lieu sacré du pays… et Kain par la même occasion. Derrière ces portes se tenaient l’objet de sa malédiction et de sa vengeance. Bientôt, toute cette histoire serait terminée.

À suivre

La corruption des Colonnes


Dévorant l’âme du dernier chasseur de vampire, Raziel s’avança vers les lourdes portes de fer. Il les ouvrit, dévoilant le lieu le plus pure du pays : les Colonnes de Nosgoth… majestueuses, intactes et pures. Jamais encore le vampire ne les avais vues exemptes de corruption, mais au tréfonds de son âme, un souvenir éteint s'éveilla à nouveau. Ces édifices, au nombre de neuf, s’élevaient haut dans le ciel et prenaient racine au cœur de la terre elle-même. Elles représentaient les neuf puissances de ce monde et étaient inexorablement liées à l’état de santé du pays. L’Esprit, Le Conflit, La Nature, les Dimensions, l’Énergie, le Temps, les États, la Mort et, au centre, l’Équilibre, qui les reliaient toutes ensembles, étaient ces puissances. Chaque Colonne était gardée par un Gardien, tous membres du Cercle des Neuf. Ce dernier devait se servir et protéger le pilier et recevait, en échange, les pouvoirs liés à la puissance de celui qu’il servait. Et là, en leur cœur même, patientait calmement celui qui deviendrait leur bourreau. Raziel invoqua la Soul Reaver et commença à s’approcher des Colonnes. Kain se tenait dos à lui et ne semblait pas remarquer sa présence… Toutefois, lorsque Raziel grimpa sur le socle du monument, Kain parla.

- Je sens ta présence, Raziel.
- Moébius a guidé mes pas Kain dit Raziel en s’arrêtant à quelques pas de celui-ci, mais j'aurais dû me douter que tu serais ici.

Le vieux vampire soupira d’exaspération.

- Si Moébius t'avait dit que je me cachais au fin fond des enfers m'y aurais-tu suivi, au péril de ton âme? Moébius se repaît des ignorants et des imprudents, harponnant ceux qui se noient dans les tourbillons de leur destinée. Garde-toi de ses rets, Raziel.
- Épargne-moi tes métaphores fleuries, Kain! Je t'ai suivi pour une simple raison : te faire payer ta traîtrise et restaurer l'équilibre de Nosgoth.
- Et quelle volonté accompliras-tu ainsi, Raziel? La tienne ou celle de Moébius?

Kain avança, s’approchant des Colonnes.

- Tu préférerais peut-être que ce fût-ce la tienne, Kain? Dit Raziel en le suivant. Fais-moi front, l'heure a sonné!
- Ce n'est pas un jeu, Raziel. Nous ne sommes que des passagers de la roue du destin. Nous arpentons le cercle, et sommes revenus ici pour une raison claire.

Kain posa l’une de ses mains sur la Colonne de l’Équilibre… sa Colonne.

- J'ai vu le commencement et la conclusion de notre histoire, Raziel! C'est un conte cruel et peu engageant. Nous devons ensemble en réécrire la fin, Raziel!
- Retourne-toi Kain, cria Raziel. Même toi ne mérites pas de mourir en lâche!

Le vampire des âmes était aveuglé par sa rage et n’écoutait pas un mot de ce que disait son ancien maître.

- La coutume n'accorde-t-elle pas une faveur au condamné? demanda Kain en se retournant finalement vers son ancien lieutenant.
- Je ne me souviens pas que tu l'aies jamais respectée dédaigna Raziel.
- De grâce Raziel implora Kain. Je te demande simplement d'écouter. Voici le point d'orgue de notre perte, Raziel, le moment où bascule toute notre histoire, l'heure pour Nosgoth d'être trahi : en cet instant, Ariel, gardienne de l'Équilibre, est occise par de sombres puissances avides d'abattre les Colonnes. Son esprit perdu dans les limbes, tente de se libérer et de rejoindre ces lieux. Tu sais déjà qu'elle viendra hanter ces Colonnes…
- Enchaînée ici par ta peur de mourir explora le vampire des âmes. Tu es à l'origine de l'agonie de ce monde : tant que tu vivras, Nosgoth sera condamné à une éternité de déchéance!
- Paix, Raziel. Observe plutôt.

Raziel révoqua la Soul Reaver, voulant bien écouter Kain jusqu’au bout.

- La mort d'Ariel vit ma naissance continua Kain, destiné que j'étais à la remplacer en tant que gardien de l'équilibre. Tel était mon lot.

Tout d’un coup, la réalité se déchira, provoquant un bouleversement indescriptible à travers tout le pays. Le tonnerre se fit entendre et les Colonnes, pures, intactes et blanches, devinrent corrompues, noires et décrépies.

- Mon dieu murmura Raziel.

Kain avait pendant tout ce temps gardée une main sur la Colonne de l’Équilibre et l’autre main sur son visage, comme si cet événement le faisait souffrir… ou revivre de sombres souvenirs. Semblant retrouver ses esprits, Kain continua son récit.

- Alors que je pousse mon premier cri, Nupraptor, l'amant d'Ariel découvre sa dépouille. Abattu de douleur, ravagé de soupçons, Nupraptor sombre dans la folie, folie qui infecte aussitôt tous les gardiens symbiotiquement liés, comme je le suis. Les conséquences de l'assassinat d'Ariel avaient été calculées… Le cercle tout entier sombre dans la démence, et je suis souillé au moment même de ma naissance, désormais impuissant à remplir le rôle qui devait être le mien.
- Désires-tu donc l'absolution que tu donnas aux survivants du Cercle? Tu les as massacrés pour sauver les Colonnes, et pourtant tu as reculé devant l'ultime sacrifice! Pourquoi t'épargnerais-je Kain? N'es-tu pas le dernier? Tu me condamnes simplement parce que j'entends finir ce que tu n'as pas eu le courage d'achever?
- Fi de cet étalage moraliste dit Kain, agacé par l’aveuglement de Raziel. Nous connaissons tous deux le manque d'altruisme de ta démarche! Une téméraire hargne t'a guidé. Je l'avais prévu ainsi. Hé hé, n'aie pas honte, Raziel, si la vengeance n'est pas noble, au moins est-elle sincère. Hais-moi Raziel, mais fais-le honnêtement…

Kain marqua une pause, cherchant ses mots. Ces événements allaient se dérouler dans trente années, mais il les avaient vécus il y a de cela plus de deux millénaires. Le temps peut créer de bien grandes confusions.

- Dans trente ans poursuivit Kain, je serai confronté à un dilemme, un jeu de pile ou face en sorte : Face, je me sacrifie et restaure ainsi les Colonnes. Mais, dernier vampire de Nosgoth, je condamne notre espèce à l'extinction ; Moébius y aura veillé. Pile, je refuse le sacrifice et je condamne les Colonnes à une éternelle décrépitude. Dans les deux cas, c'est un jeu de dupes.
- Tu en conviens donc? demanda Raziel. Il est capital de restaurer les colonnes?
- Oui, Raziel. Nous sommes ici pour boucler le cycle.

Le vampire des âmes retrouva sa haine envers son ancien maître, désirant le détruire une bonne fois pour toute.

- Tu admets finalement l'inévitable dit-il. Pour sortir de l'impasse et que de nouveaux gardiens naissent, tu dois mourir.
- Les Colonnes ne sont pas leur propriété Raziel dit Kain en parlant des humains, elles sont la nôtre.
- Ton arrogance est sans limite Kain dit Raziel avec un ton menaçant.

Malgré tout, le vieux vampire restait passible et confiant en lui-même, comme s’il savait que Raziel n’allait pas le tuer, voir même l’attaquer. Il se mit même à rire.

- Il existe une troisième option, Raziel. Ta simple présence ici en est la preuve. Mais c'est un secret qu'il te faudra révéler seul. Découvre ton destin, Raziel. Il n'attend que toi.
- C'est ridicule, Kain. Tu l'as dit toi-même : une pièce n'a que deux faces!
- En apparence. Mais imagine que tu lances une pièce assez de fois pour qu'elle tombe un jour sur la tranche…

Suite à ces mots, Kain disparut de la vue de Raziel grâce à son sort de téléportation. Cependant, Raziel ne broncha pas. Il ignorait pourquoi il avait retenu sa main, pourquoi il avait laissé Kain s’enfuir, celui qu’il avait si longtemps pourchassé. Raziel n'avait aucune raison de le croire après ce qu'il lui avait fait subir et pourtant, ses paroles l'intriguaient. Le vampire des âmes avait été trop utilisé pour pouvoir accepter gaiement un rôle dans la nouvelle tragédie de son ancien maître. Si ce monde lui réservait encore des secrets, il les dévoilerait seul. C’est sur ces pensées que Raziel quitta le site des Colonnes, toujours calme et serein, mais désormais sombre.

À suivre