Les Joyaux Des Mondes... Fanfiction

J'hésite encore, je fais quoi ? J'ouvre cette grande porte ? C'est pas un peu risqué quand même ?

Quelqu'un prit la décision pour moi. La porte s'ouvrit brutalement, laissant passer une petite silhouette en toge, puis se referma de la même façon. Il prononça des mots bizarre, peut-être pour la bloquer, puis se retourna sans me voir. Il s'avança un moment, en soufflant bruyamment, sembla reprendre son calme, puis enfin m'aperçut, dans un coin, et se mit à hurler :
"Mais il sort d'où encore lui ? Comment avez-vous fait pour arriver jusqu'ici ? Personne ne connait l'existence de ce passage ! Vous devez avoir une excellente vue dans le noir pour avoir remarqué ce passage ! Qui êtes vous ?
-Je vous retourne la question...
-Mais ! Mais ! Je suis le révérend Kapador, pardi ! A quelle ignorance ai-je l'affaire ?
-Je suis Sir Xenon, et vérifions ensemble qui a la part d'intelligence la plus réduite !
-Et bien Seigneur, vous n'avez aucune chance face à ma magie. Heureux de voir que ceux qui voient dans le noir sont bien ignorants dans le jour !"

Et il commença à enchaîner les boules de feu en ma direction, mais je bougeai suffisamment pour les éviter. Pour ce genre de sorcier peu puissant et prétentieux, une seule solution : leur faire croire qu'ils vous tiennent, pour les surprendre au dernier moment. Et c'est ce que je fis...
Il enchaîna les boules bizarres, les pics de glace, et autres petits sorts très utlies dans les combats de groupe. Mais dans un combat singulier, sans attaque particulière, il est difficile de gagner. Je n'eus aucun mal à faire semblant de me fatiguer, tout en m'approchant doucement en tournant autour de lui. Et brutalement, alors qu'il se calmait pour souffler un peu et récupérer un peu d'énergie, j'attaquai, et sans qu'il n'y comprenne quelquechose, je lui coupai ce que je pus. Il y perdis un bras et un doigt de l'autre main. Il tenta de reprendre pied, mais dès lors j'eus le dessus. Il tenta de se défendre encore, mais je finis par le transpercer par Tesla la belle, sans qu'il ne puisse rétorquer...

Je m'assis à côté, le combat m'ayant épuisé. Ce n'était plus de mon âge, tout ça. Certains prennent leur retraite, moi je continue à défendre mon Dieu. Et avec tout ça, je n'ai pas eu le temps de me préparer et de créer mes auras. En tout cas, le révérend était mort. Maintenant, pour qu'il ait fuit la salle à côté, il devait y avoir ses ennemis...Peut-être mes compagnons ?
Le sortilège qu'il avait mis sur la porte s'arrêta avec sa mort. Et la porte s'ouvrit quelques instants plus tard, et une poignée de soldats, avec le même équipement que ceux de la forêt, entrèrent, totalement désorganisés...

"Là, par contre, je suis mal..."

Je me sentais incapable d'enchaîner un deuxième combat. Ma forme physique avait définitivement baissé. Deux soldats bloquèrent la porte, trois autres se dirigèrent vers moi...
Tout à coup, une ombre sortit de la petite porte par laquelle j'étais sorti, et attaqua directement les soldats. Ce fut un beau combat, un peu long, mais l'ombre sortit vainqueur du combat...Meinarth était venu à ma rescousse, et avait retrouvé son énergie juste à temps...Le combat face au révérend avait dû durer bien longtemps...

Les soldats tenant la grande porte reculèrent, laissant entrer un Druide, un Ours et un élémentaliste à la tête de tout le groupe. Ils tuèrent sans problème les soldats, et nous nous retrouvâmes tous au milieu de la petite salle...

"Nous avons commencé par trouver les cachots où nos amis étaient enfermés, puis nous avons réussi à sortir du tunnel et nous avons débouché au milieu des soldats de l'église et d'une messe funeste dans laquelle Andrethel était le personnage principal !" m'expliqua Montery. "Et je crois que le compte est bon, ils sont tous morts...Bravo à tous les deux pour le révérend, il était corriace !"

Je regardai Meinarth, qui avait remis son capuchon et se tenait un peu à l'écart. Je bredouillai un vague merci, mais j'étais fatigué. Le sorcier m'avait touché à plusieurs reprises, quoi que j'en dise, et il me faudrait du repos pour pallier à ces blessures. Mais j'étais satisfait. Pas de notre victoire, ou du fait qu'on ait retrouvé Andrethel, évanoui mais en bonne santé. J'étais satisfait de savoir quelquechose que je garderai pour moi, quel était le vrai nom de Meinarth, quel était le secret que ce personnage de l'ombre avait souhaité maintenir caché...
Mais le Destin est souvent plus fort que notre Volonté...Tu devrais le savoir, Dardomez...

SirXenon et Meinarth semblait s'être bien débrouillé devant le révérend et ses sbires. J'aurais tout le temps pour le récit du combat plus tard. Cependant c'était la première fois que je voyais cette flamme dans le regard du paladin depuis le début de cette aventure. Espérons que tout ce dont il avait besoin, c'est un bon petit combat pour se prouver à lui-même qu'il est important ici.

Il fallait retrouver Andrethel. Nous nous sommes séparés et nous avons fouillé le bâtiment de haut en bas sans trouver de trace de notre camarade. Nous étions sur le point de chercher dans toute la ville lorsqu'on m'avisa que Kyorn semblait avoir trouvé un passage secret dans les cachots.

Un court couloir était dissimulé dans une des cellules. De l'autre côté se trouvait une pièce humide et malodorante éclairée par des cierges qui répandaient une odeur âcre à peine soutenable. La faible lueur nous permettait de voir trois corps. L'un était Andrethel, qui semblait fou de joie sans nous apercevoir. En faisant quelques pas ,il était facile de comprendre que celui coucher sur le sol était mort; sa chemise arrachée laissant deviner un torse ruisselant de sang, probablement tout grand ouvert si je me fis à la troisième silhouette.

Le mot silhouette était en effet le meilleur mot à employer. C'était humanoïde, de la taille d'un homme. Pourtant on ne voyait aucunement ses traits et sa nudité ne laissait rien deviner de son corps. Il semblait matériel mais c'était sans doute le mieux que l'esprit d'Andrethel avait réussi: une forme indistincte, rouge de la tête aux pieds, sans trait.

Notre compagnon remarqua enfin notre présence.

"Approchez! J'ai réussi! Le révérend sera fier de moi. Il va me pardonner de m’être enfui. J'ai suivi ses instructions à la lettre et j'ai réussi!"

Divers articles cérémonials jonchaient le sol près du cadavre... Ainsi qu'un parchemin.

Il souriait et parlait au démon qu'il avait invoqué.

"Je crois que le révérend aimerait bien que tu le renvoies d'où il vient." lui dit doucement Ulbreck.

"Mais non il vient d'arriver, et il est si amusant. Il fait vraiment tout ce que je lui demande vous savez. Et je n'ai même pas besoin de lui parler c'est comme s'il devinait mes pensées, c'est fou non?"

Le démon se mit à quatre pattes et commença à tourner frivolement autour de l'apprenti magicien.

"J'ai si hâte qu'il vienne le voir. Il va me récompenser, il l'a dit!" continua Andrethel.

"Tu pourrais lui dire de retourner d'où il vient et la ramener à nouveau. Je suis sûr qu'il aime voyager." négocia le chevalier.

"Non, le révérend a promis de venir le voir très bientôt." s'acharna notre pauvre ami.

"Oui, mais ton crapaud de révérant, on l'a..."

J'assenai un coup de poing à Joker, ce qui donna l'idée au géant de répliquer pour le défendre. Une mini-mêlée générale s'en suivit.

"Ne lui dites rien sur son révérend! S'il s'énerve ou s'il perd sa concentration, le démon va prendre le dessus, s'attaquer à Andrethel et nous tuer tous par après!" dis-je finalement en me massant la mâchoire.

Millenia nous pointa le démon et son maître du moment. Je croyais qu'elle voulait nous montrer l'incertitude sur le visage du petit humain mais des mouvements sous la peau du démon étaient clairement visible. Ce petit imbécile ne connaissait rien au corps humain et avait dû créer une enveloppe vide sans rien à l’intérieur : ni chair, ni sang, ni nerfs ou quoi que ce soit. Le démon profitait de l'inattention momentanée pour forcer une des nombreuses failles de son indigne enveloppe terrestre.

C'est Navok qui eut la rapidité d'esprit d'éviter le pire.

"On est très impressionnés par tes talents Andrethel, on se battait pour savoir qui allait te féliciter en premier."

"Vraiment?! répondit le principal intéressé. Et tu as gagné?"

"Bien sûr. Tu pourrais lui faire faire d'autres tours, c'est marrant, tu as raison."

Andrethel reprit toute sa confiance et recommença à utiliser le démon comme un animal domestique.

"On fait quoi?" demanda SirXenon.

"Bonne question, murmura Navok qui simulait d'être épaté par le démon entrain de marcher sur les mains. Il fera rien sans son révérend. Et si on tente quoi que ce soit, il pourrait bien ordonné à son démon de se défendre ou un truc du genre... Ou encore pire, sa force mentale faiblira un instant et le démon sera libre."

"Tu oublies le pire scénario." nota Meinarth. "Se battre contre ça c'est pas si mal. Il doit être résistant et d'une force prodigieuse mais c'est tout. Cependant je n'ai pas envie qu'il se libère de cette forme et qu'il reprenne sa forme primaire..."

La situation n'avançait pas, et j'ai combattu assez de démons pour savoir que si celui ci se libérait de l'emprise qu'exercait Andrethel sur lui, nous aurions du soucis à en venir à bout. Je m'avançais lentement vers notre petit invocateur...

- "Andrethel?" murmurais-je doucement.

- "Oui?" rétorqua t il, toujours concentré à manipuler son pantin.

- "Le révérend ne pourra pas se joindre à nous pour l'instant. Les Dieux qu'il a choisi de vénérer l'ont convié en des lieux où tu ne peux te rendre pour le moment. Ainsi, je pense que tu ferais preuve d'intelligence si tu choisissais de congédier ton nouvel ami chez lui en attendant son retour."

-"Mais... Il m'a dit qu'il arrivait dans peu de temps.." rétorqua t il déçu.

-"Hélas le destin est souvent plus fort que notre volonté, il ne pourra pas venir pour le moment"

Tout en prononçant cette phrase, je me senti observé par deux personnes dans le groupe, notamment Sir Xenon. Quel idiot, je dois peser le poids de mes mots quand je parle ainsi devant tout le groupe. Le cas contraire, c'est le secret de mon identité qui pourrait etre percé.

-"Qui plus est, cette contrée est connue pour une fête plutot originale il me semble, le bar-marathon, quelque chose comme ca.. Avant de repartir, nous pourrions y faire un tour, disons.. Pour nous reposer un peu. Qu'en penses tu?" Repris je avec plus d'insistance.

-"Nous devons repartir Adnrethel, n'oublies pas que la mission qui nous a été confiée est celle donnée par les Dieux. Ce révérand que tu idolatre tant est un de leur serviteur. Ne croies tu pas qu'il serait fier de toi si tu poursuivais ta quete en honorant ces memes Dieux qu'il vénère?"

Un large sourrire émana de son visage, puis l'invocation commença à disparaitre peu à peu. A vrai dire, je ne croyais pas en la réelle portée de mes mots, mais finalement, ca avait abouti. Le groupe sembla lacher un soupir de soulagement. Je me retournai vers Montery et m'approchait de lui pour lui dire discrètement à l'oreille.

-"Maintenant que tout risque est écarté, je pense qu'il serait bon de lui dire la vérité, mais pas tout de suite.. Néanmoins ne tarde pas trop, le mensonge ne permettra pas à un groupe de tenir la route.."

Plus je parlai, plus je me sentai découvert par mes anciens compagnons. Je décidai alors de retourner dans ma torpeur le temps de me faire oublier et je me placai à l'arrière du groupe. Ce petit contre temps n'était pas prévu et nous avions perdu de précieuses heures. Notre guide n'avait pas tout à fait en état. Nous décidions de sortir rapidement de l'église et de nous installer à quelques lieux du village pour passer la nuit.

Montery assis avec les autres pres du feu passa un long moment à les sermoner sur leur attitude de la journée. Je n'écoutai plus, je m'étais assis contre un arbre, apres tout j'avais suivi les directives du leader non attitré donc je n'avais pas besoin d'etre sermoné aujourd'hui. Quelle bande d'incompétents.. Je croies qu'ils n'ont pas encore compris l'interet de l'expérience et de l'écoute. Mais je pense que quand ils auront enfin compris l'interet de ce druide, le groupe s'en portera mieux.

Tout en regardant les étoiles, je repensai à ma tendre Milame, ca fait tellement longtemps que je n'ai pas été éloigné d'elle. La haut, nous vivions dans un monde qui parait tellement utopique quand on se trouve sur Terre. La bas, je ne sentai qu'une chose, un parfum agréable et qui nous porte, l'amour de ma bien aimée. Ca ne fait pas longtemps que je l'ai quitté, mais pourtant ca me semble une éternité. Je n'étais pas comme ca avant, j'étais un solitaire et le combat était mon quotidien. J'ai vraiment changé.. En tout point en me regardant, je repense à ce cher Sir Xenon, si le sang ne nous a pas uni, je nous considère vraiment comme des frères, en tout point.. Si ce n'est que je n'ai pas vieilli et qu'il a toujours été plus fort que moi.. Il doit aussi souffrir de l'absence de sa Pol.

Demain, nous aurons les directives de Montery, jusque là, je décidai de me reposer.

Meinarth

Si SirXenon peut retrouver entièrement ses sens... J'en ai assez que tout le monde attende le moindre signe de ma personne avant de bouger le petit doigt.

Comme si je le savais plus qu'eux. La dernière fois, après la bagarre la sibylle était apparue. La nuit était tombée et toujours pas de nouvelles... Comment aurais-je pu deviner ce qu'une sibylle qui emploie un charabia incompréhensible peut bien penser?

J'ai très mal dormi cette nuit-là. Pas à cause de ces enfants qui attendaient des instructions mais à cause d'Andrethel qui avait pété un plomb en apprenant le trépas de son gourou. On avait réussi à le faire sortir de la ville mais nous devions le surveiller sans arrêt car il tentait de retourner près du cadavre du révérend et pleurer toutes les larmes de son corps ou l'enduire de parfums ou je ne sais quoi exactement.

J'avais été très surpris que Meinarth réussisse à le convaincre de laisser tomber son démon. En effet, il employait des mots bien trop compliqués pour l'esprit du petit roublard. Cependant j'étais content de voir que quelqu'un ici ne résolvait pas tous ses problèmes avec la bagarre. Mais il m'énervait encore, je ne savais pas exactement pourquoi. Ses allures on aurait dit.

Au petit matin, après avoir déjeuner, j'avais à faire un petit discours car c'est ce qu'on attendait de moi. J'étais donc de très mauvaise humeur.

"Bon, si la sibylle nous a dit de venir ici, y'a sûrement une raison."

"Bah si, se débarrasser d'un invocateur de démons. Elle avait besoin de nous pour faire son sale boulot."

J'avais très envie de répliquer ce que je pensais de Millenia et de ses visions sur le sale boulot mais je me suis retenu sur le moment.

La sibylle avait dit "Vous y découvrirez ce qu'est le prochains artefact et son emplacement." précisa Aurica.

"C'est vrai. Elle a jamais dit qu'elle y serait." ajouta Kyorn.

"Et on le découvre comment, ce qu'est l'artefact?" demanda Darek.

"Il est forcément ici... supposai-je. On a pas mal fait le tour de l'église alors il est sûrement dans leur château. Mais qu'est-ce qu'un château fait au milieu d'un camp primitif?"

"C'est la première chose qu'ont bâti nos ancêtres!" cria Andrethel. "Si vous n'aviez pas assassiner mon bon révérend, il vous aurait tout raconter." sanglota-t-il.

"Et bien raconte." lui demandai-je mais il était à nouveau en pleine crise.

"Allons visiter ce château. C'est mieux que rester là à rien faire." proposa Ulbreck.

"Ce château ne me dit rien qui vaille. Pourquoi bâtir un château si c'est pour l'entourer de cochons et de détritus?"

"Incultes. Tout cela est dans l'histoire!" pleurnicha Andrethel.

"Raconte-nous." demanda gentiment Isara.

"Vous ne le méritez pas. Vos oreilles indignes n'auront jamais le plaisir de l'entendre. Allez la lire si vous voulez."

"La lire?!"

"Moi c'est le révérend lui-même que me l'a raconté. À chaque semaine durant 16ans. Oh oui, il était fier de moi."

"Ok ok on va aller la lire si on n'a pas le choix." simula Navok. "Où se trouve ce parchemin?"

"Ahah, un parchemin? Elle est gravée sur une pierre, par-là. C'est la plus ancienne chose que nous possédons!" fit-il en indiquant le sud.

"Mais tu disais que c'était le château..." soupira Darek.

"Tu peux être plus précis?"

"Non je ne l'ai jamais vu. J'ai eu l'honneur d'entendre toute l'histoire, moi!"

"Elle n'existe même pas si ça se trouve." marmonna Darek.

"Bien sûr que si. Il l'a dit!"

"Allons fouiller ce secteur avant que je m'impatiente..." dis-je.

On y a mis toute la journée mais on est finalement tombé dessus. Une pierre plate, ronde, et polie. Un cercle parfait d'environ un mètre de diamètre. Elle était enterrée par les herbes ce qui laissait deviner que la populace locale se fiait entièrement à leur chef religieux et ne prenait pas la peine de venir voir la base de leur religion.

Ils avaient déjà eu du talent par ici. C'était impressionnant comme gravure. On ne devinait pas tout mais Andrethel n'a pas réussi à s'empêcher de nous raconter pour pas qu'on comprenne tout de travers... Ils venaient du royaume de Scheissel. Ils avaient été bannis pour une (fausse) histoire de complot contre le célèbre roi Schei II. On le voit résister à l'attaque des traîtres grâce à son bouclier. Les (faussement accusés) belligérants et leurs famille eurent à s’exiler vers le nord-ouest où ils fondèrent leur propre royaume en jurant de se venger. Le reste n'est pas écrit mais on suppose qu'ils construirent ce château, oublièrent tout l'art et la technologie qu'ils possédaient par la suite, se sont vautrés dans ce mode de vie facile et finalement oublier leur projet de conquête, si ce n'est que dans un discours hebdomadaire.

"En voilà une bonne nouvelle." s'exclama Ulbreck.

S'il parlait que nous savions maintenant que nous devions aller récupérer le bouclier de Schei II j'aurais été satisfait. Mais lui parlait de ce royaume berceau de la chevalerie.

Quelqu'un qui ne me connaît pas pourrait croire que c'est un endroit que j'aime bien. Les gens d'une extrême politesse, un taux de crime incroyablement bas, la justice régnant partout... Mais c'est loin d'être aussi paradisiaque. Les gens sont si maladivement obsédés quant à protéger la veuf et l'orphelin que ça leur a ramolli la cervelle au point de ne penser qu'à ça. Protégeant leurs bonne gens, ils oublient totalement de s'occuper du monde extérieur et repoussent toute délégation trop imposantes d'étrangers de peur qu'ils n'amènent les problèmes avec ceux. On ne peut pas traverser le royaume sans se faire défier en duel une ou deux fois pour avoir plier le mauvais brin d'herbe ou pour avoir regarder une femme plus d'une demi-seconde. La chevalerie étant le boulot rêver de tout homme, cela à pour résultat que tous s'enrôlent pour devenir écuyer et il reste bien peu de gens compétents pour les métiers plus utiles à une communauté. Ces gens me tombaient royalement sur les nerfs. La neige se mit de la partie. Elle nous avait suivi dans notre descente vers le sud. Alors que nous prenions une dernier nuit de repos, je songeais que j'aurais au moins 10 jours devant moi avant de me faire à l'idée que j'allais en Scheissel de mon plein gré...

"Qui a volé mes bottes ? Qui a bien pu faire une chose pareille ! Si je l'attrape, je...
-Millennia, tu devrais parler moins fort, je pense que...
-Je me moque de ce que tu peux penser, Chevalier Ullbreck, toi tu as toujours de quoi marcher ! Moi il me manque mes bottes, et voila une chose bien gênante pour une guerrière ! Je veux mes bottes maintenant !"

Voyant que la plupart des autres tentaient vainement de s'arracher à leurs rêves sans vraiment y parvenir, que Montery souriait sans avoir une seule envie de bouger le petit doigt, et que Navok et Meinarth devaient dormir à l'écart, je me décidai à aller voir la raison des hurlements de Millennia au milieu de la nuit...

"Qu'est-ce qui se passe, Millennia ?
-Il se passe qu'on vient de me voler mes bottes ! Je me réveille, j'ai envie de me dégourdir les jambes, et voila qu'elles ne sont plus avec mon armure ! Faut-il que désormais je dorme avec mes bottes aux pieds ? C'est insupportable !"

Ce qui était vraiment insupportable, c'était les cris de colère de la guerrière, qui ne semblait diablement pas plaisanter à ce sujet. Surtout ce genre de cri au réveil. Je regardai un moment mes pieds, avec les bottes avec lesquelles j'avais justement dormi, je me grattai un moment la tête...

"Pourtant les tiennes sont plutôt reconnaissables, avec leurs pics, un voleur ne doit pas être avantagé avec ce genre d'équipement...J'imagine que tu as déjà vérifié que tu ne l'avais pas posé ailleurs, et...
-Mais bien sûr ! Pour qui me prends-tu ? Je sais Exactement où j'ai posé ces satanés bottes, et je compte bien les trouver ! Si elles n'y sont plus, c'est que quelqu'un me les a prise..."

Le grand Ullbreck semblait plus que troublé par cette affaire, et cherchait désespérément du regard une raison à la disparition de ces bottes. Pour ma part, je réfléchissais qu'en aucun cas nous n'aurions pu être attaqué ou investi par des ennemis, puisque Ullbreck et moi avions pris notre tour de garde. A moins qu'il soit lui-même un traître, je ne vois pas d'autre explication qu'un vrai problème interne...

Le problème venait du fait que Millennia ne pouvait pas se déplacer sans bottes, du moins c'est ce qu'elle disait, et donnait des ordres à tout le monde, alors que la plupart refusait de se lever pour un motif aussi futile qu'une paire de bottes. Il n'est de plus pas aisé de chercher avec une femme qui hurle et des gens couchés un peu partout, surtout en pleine nuit. Je n'ai pas du tout une excellente vue dans l'obscurité...

Ullbreck vint discuter avec moi de ce qu'il pensait de la Dame volée et de l'affaire en elle-même, quand nous entendîmes deux autres personnes crier. Il s'agissait de Meinarth et Navok...
"Qu'est-ce que vous faîtes ? Et où sont les veilleurs ? Voila une vingtaine de créatures bizarres qui s'approchent ! Réveillez-vous !"

Millennia criait toujours, mais après la bande d'incapables que nous étions de ne pas savoir prendre son tour de garde. Alors qu'à peine quelques secondes auparavant il aurait fallu que tout le monde se mette à la recherche de ses bottes. Résultat, elle n'avait pas de botte pour combattre...

Ullbreck, Meinarth, Navok et moi pûmes commencer le combat sans attendre. Une chance que les deux autres aient pu entendre nos ennemis arriver, grâce à leur éloignement du camp. Il faut dire que Millennia hurlait tellement fort qu'il nous était impossible d'entendre quoi que ce soit. En revanche, il était aisé de nous faire repérer ! Peut-être avait-elle réveiller Navok ou Meinarth, et qu'ils ont vu sans se faire voir des ennemis attirés par la douce voix de la guerrière blonde si aimable...

Les créatures en face de nous ne devait pas être plus d'une quinzaine, mais elles profitaient sans nul doute de l'effet de surprise. Cela ressemblait à des orcs, mais probablement taillés pour le désert. Ils étaient plus petits et plus costauds, et portaient des armures légères mais dangereuses. Quant à nous, il régnait dans le camp une agitation des plus démentielles, tout le monde courant dans tous les sens en espérant retrouver son arme...Sauf Millennia hurlant toujours sur ses affaires pour dormir qu'il fallait lui retrouver ses bottes...

Nous repoussâmes à quatre le premier assaut des créatures, mais comprîmes vite qu'il nous serait nécessaire d'avoir un peu d'aide pour passer à l'attaque sans attendre. Montery et Kyorn nous rejoignirent assez vite, comparés aux autres, et nous pûmes enfin passer vraiment au combat. Navok semblait particulièrement ne pas être gêné par les Ténèbres autour. De mon côté, Tesla brillait de sa lueur bleue qui me faisait si chaud au coeur, m'emmenant au-delà de moi-même. Cependant, une nouvelle fois, je n'avais pas eu le temps de me préparer pour le combat, et d'invoquer au préalable mes auras...Nous verrions cela pour le prochain combat, visiblement...

Kyorn se retrouva brutalement assailli par deux adversaires, et dans le noir avait du mal à se défendre. Il recula un peu, avant de trébucher sur un corps encore allongé, se mettant ainsi totalement à découvert dans sa surprise. La créature la plus proche leva brutalement son épée, et la rabaissa aussitôt...
Mais Kyorn put parer ce premier coup ! Cependant, l'autre créature fit exactement le même geste, et le héros ailé n'avait plus de solution pour se défendre...
C'est alors que Ullbreck sauta en avant, et reçut le coup d'épée dans l'épaule. Il s'effondra dans un râle, pendant que j'accourai trancher la tête de la créature fautive, de mon épée bleue. L'autre se retourna vers moi, ce qui permit à Kyorn de la tuer sans problème. Il demanda alors à Aurica, qui avait ses dons de médecine, de s'occuper du chevalier mal en point, avant que nous retournâmes au combat vers les quelques créatures restantes...
Entre temps, le géant, Joker et Isara s'étaient joints à la bataille, et nous eûmes avec Kyorn à peine le temps de tuer une créature que le combat était terminé. Une bonne chose de faite...

Cependant, une idée me revint. Je retournai vers le corps sur lequel Kyorn avait trébuché, devancé par ce dernier qui avait dû avoir la même idée...
"C'est bon, j'ai la solution à notre problème !" lança-t-il.
Andrethel gisait allongé tranquillement sur le ventre, visiblement effrayé, le haut des bottes de Millennia dépassant de sous lui...

Kyorn expliqua à Millennia qu'on avait retrouvé les bottes au milieu du camp, sans explication valable, pour éviter de perdre un compagnon. Nous supposâmes avec Kyorn qu'Andrethel n'avait toujours pas digéré la perte de son révérend, et que voler les affaires d'une des plus désagréables du groupe avait dû être sa vengeance. Il faut cependant avouer qu'il devait avoir eu de la chance, ou qu'il était doué, car Millennia ne l'avait pas entendu. A moins que cette dernière n'ait le sommeil profond !

Le but était de repartir à l'aube. Nous avions facilement 4 à 5 jours de chevauchée encore, et il ne fallait pas traîner. Cependant, l'état d'Ullbreck n'était pas bon. Selon Aurica, l'épée l'ayant blessée avant dû être empoisonné, ou quelquechose comme ça...
Il fallut faire en sorte de le mettre sur un cheval et de l'y placer afin qu'il ne tombe pas. Nous nous arrangeâmes pour qu'il soit plus ou moins attaché et que son voyage ne se passe sans encombre. Nous verrions dans une prochaine ville pour des soins plus appropriés, car Aurica avait fait du bon travail mais ne possédait pas tous les remèdes nécessaires, et la blessure pourrait s'infecter ou rencontrer quelques soucis avant la fin de l'aventure !

En montant mon cheval, je songeai que cela faisait maintenant un bon moment que j'avais quitté l'Amour qui me liait à la vie, et que j'arrivai désormais à passer au-dessus de tout cela. J'avais réfléchi au fait de ce qu'elle voudrait de moi, et avait conclu qu'elle serait fière si son homme combattait pour de vrai et ne se repliait pas sur lui-même pour n'adresser la parole à personne. Et quand je vois le coup reçu par Ullbreck tout à l'heure, la vie va tellement vite...

Il me semble inutile de gaspiller du temps à pleurer le Passé tant qu'on a encore un bout d'Avenir à écrire...

Évidemment ça devait se terminer ainsi. C'était la nuit la plus reposante que j'avais eu depuis le début de ce voyage. Je n'arrivais pas à dormir mais c'était si relaxant de voir Millenia chercher ses bottes pendant quelques minutes avant qu'elle ne fasse une folle d'elle devant tout le monde...

Je savais bien que Scheissel monterait à la tête d'Ulbreck. Mais je croyais que les effets ne se feraient pas sentir avant d'y être. Et c'est nous qui devions réparé les dégâts.

"Je ne peux rien faire pour lui dans ses conditions..." fut la bonne nouvelle que nous donna Aurica. La mauvaise était qu'en plus la lame était empoisonnée.

Je mis des herbes à macérer, trempai un linge et pris une louchée du liquide.

"Met lui ça sur l'épaule." demandai-je à Aurica alors que je faisais boire Ulbreck qui tremblait de tout son corps.

"C'est quoi?" demanda-t-elle, soucieuse de la santé de son patient.

"Ça va ralentir le poison. Habituellement on ne l'utilise que sous formes de compresses mais dans le cas présent je ne crois pas que lui en faire boire puisse nuire... plus que c'est déjà le cas du moins."

"Ralentir le poison! Mais il ne faut pas le ralenti, il faut un contre-poison."

"Si tu es capable de me dire le nom du poison en quelques minutes avec ta soi-disante science, alors que fais-tu encore assise là? C'est le mieux que je peux faire si tu ne me dis pas c'est quoi."

"Ça prendrait des heures, sinon plus! Et je n'aurais pas besoin de remèdes barbares pour fabriquer le contre-poison si je pouvais l'identifier!"

"Et bien justement tu ne peux pas. Et contrairement à toi j'essaie d'agir au lieu de le regarder mourir."

"Vous n’allez pas commencé." fit Kyorn.

"Il faut l'amener dans un lieu tranquille, où on trouvera des guérisseurs." suggéra Isara.

"Il n'y avait pas une auberge avant la frontière?" demanda Kyorn.

"Oui..." fit SirXenon qui ne se souvenait pas de son emplacement exact.

"Il en reste deux d’ici la frontière. La plus près est encore à cinq heures au galop, ce qu'on ne peut pas faire avec notre blessé." dis-je.

"On va chercher un guérisseur!"

"Mais..."

Joker et le géant, qui avait eu sa première idée depuis le début du périple, étaient déjà partis. Deux de moins dans les jambes.

"Fabriquons une litière... On la maintiendra entre deux chevaux... "

"Ça va prendre un temps fou!" fit Millenia, qui était la seule à ne pas s'activer pour la survie de notre compagnon.

"Il ne s'en sortira pas."

Ce n'était pas la voix désagréable de Millenia. Je me retournai et vit une silhouette pâle, de femme, dont le visage était couvert de cicatrice et de sang coagulé entre des mèches de cheveux sales.

"Il va mourir et vous le savez." continua le fantôme.

"Va-t-en." rugit Millenia.

"Il viendra nous rejoindre. Il hantera ces lieux. Avec de la chance il vous maudira et vous tourmentera... C'est tout ce qu'on peut espérer une fois mort..."

Millenia lui donna un coup d'épée inutile. Je ne prenais pas la peine de regarder mais j'entendais tout de même.

"Ça c'était offensant, s'offusqua le fantôme. Un si bel homme... Souviens toi que je fus la première à t'accueillir, beau chevalier. Tu apprendras rapidement que la seule chose pire que souffrir éternellement, c'est de souffrir seul."

"NOOOOOOON!"

Cette fois-là je fus surpris et je me retournai juste à temps pour voir le spectre traverser le corps étendu d'Ulbreck et disparaître.

Quelle bande d’incompétents… Ils s’agitaient tous à essayer de réparer leur erreur, leur manque d’attention… Mais il était déjà trop tard, incompétents…

-« Ulbreck est parti de votre faute… Misérables que vous êtes… Êtes-vous seulement prêt à affronter les épreuves qui nous attendent… ? » Hurlais-je sans m’en rendre compte.
- « Parce que tu te croies meilleur que nous peut-être ? » rétorqua Millennia tout en dégainant son épée.

Avant même que son épée soit totalement sortie de son fourreau, je m’étais positionné derrière elle, retenant sa main. Et doucement je lui chuchotai à l’oreille « Tu ne fais pas le poids… ». Avec son autre main elle dégagea la mienne et s’éloigna de moi en lançant des jurons.
Je ne sais pas pourquoi cette mort m’atteignait autant. En voyant ce combattant au sol, je repensai à tous mes amis perdus au combat, à mon incapacité à protéger ceux qui comptent sur moi… J’avais déjà fait preuve de faiblesse de par le passé, et encore aujourd’hui, il semblerait que je ne soies pas à la hauteur. Tout en résonnant dans ma tête, les mots prenaient de l’importance et une aura noire commença à se former autour moi. Si Sir Xenon et Montery s’en apercevaient, il ne ferait plus aucun doute quant à mon identité, je ne connais personne d’autre capable d’utiliser cette compétence puisqu’elle m’a été léguée par un démon. Mais il était déjà trop tard, l’aura commençait à se matérialiser autour de moi et à envelopper les contours de mon corps.
Je regardai Sir Xenon voir s’il s’était aperçu de quelque chose, je le soupçonnai déjà d’avoir quelques doutes sur moi, après tout, même si le sang ne nous liait pas, nous étions comme des frères…

-« Enterrez-le ! », c’est tout ce que je réussi à dire avant de m’éloigner du groupe le temps de me calmer.
-« Et pourquoi nous ? » repris l’un des membres du groupe.
-« Enterrons-le ! » repris sèchement Montery comme s’il m’avait compris.

Je m’enfonçais dans la forêt où nous nous trouvions, vite, essayant de m’éloigner le plus possible. La nuit était plutôt belle, d’innombrables étoiles venaient illuminer l’obscurité et la lune était pleine. Je trouvais un endroit paisible près d’une rivière et je m’asseyais sur un rocher. De là j’observai le ciel tout en pensant à la seule personne capable de calmer les fantômes qui me tourmentent… Milame où es-tu… ? Tout est tellement plus simple quand tu es là… Qu’est ce qu’un guerrier sans sa force ? Tu me manques…

-« A qui penses-tu Meinarth? » dit une fois me semblant familière.
Je me retournai hâtivement…
-« Sir Xenon… Pourquoi m’avoir suivi ? »
-« Et bien… Pourquoi pas ? »
-« Si tu n’as rien de plus pertinent, excuses moi, mais je souhaite être seul ». Doucement, je me relevai pour aller plus loin, mais il me stoppa net en présentant son épée comme argument.
-« Si tu veux partir, il faudra que tu libères le passage »
Ne souhaitant pas le combat et ne comprenant pas quel intérêt il avait à vouloir me garder ici, j’essayais de partir dans une autre direction, mais à nouveau son épée s’interposa.
-« Et bien ? Aurais-tu peur de ma lame ? Serais-tu trop LACHE pour essayer de me vaincre ? »
Ces dernières paroles m’exaspérèrent profondément et sans réfléchir, je dégainai mon épée et l’attaquais. Il esquiva facilement mon attaque en faisant un saut en arrière. Un léger sourire aux lèvres, il se mit en posture de combat. N’écoutant que ma colère, je tentai de lui donner un nouveau coup, qu’il para avec son épée. D’un coup de poing avec ma main gauche, je le forçai à reculer, mais il contre-attaqua rapidement empêchant ma progression. Son style de combat n’avait pas changé, le bougre n’était pas mauvais. Je reculai de quelques pas pour analyser la situation.
-« Cette aura… Qui es-tu donc ? » M’interrogea Sir Xenon
-« Un fantôme du passé ! »
Tandis qu’il s’apprêtait à parler à nouveau, je l’attaquai à nouveau, il para à nouveau avec une aisance déconcertante. Il leva rapidement son épée pour me porter un coup verticale, je parais tout aussi simplement qu’il ne l’avait fait auparavant et reculai.
Tandis que nos épées continuaient à danser l’une contre l’autre, Sir Xenon continuait à me parler :
-« Je sais maintenant sans aucun doute qui tu es… Croies-tu vraiment qu’un humain seul peut changer le monde ? Croies-tu vraiment qu’Ulbreck est mort de ta faute ? Le passé n’a rien à faire avec le présent, oublies le maintenant Dardomez, tu as accompli de grandes choses comme nous tous. Nous n’avons pas besoin d’un fantôme, nous avons besoin de toi. Tes épaules ne peuvent pas seules supporter le sort du monde. »
-« Je n’ai besoin de personne vieux frère… »
Sur ces dernières paroles, il repartit aussi discrètement qu’il était venu sans prononcer un seul mot de plus.
Je me rasseyais sur ce rocher surmontant la rivière… Milame, aides moi…

Et voilà, ça commençait.

J'étais trop furieux sur le moment alors j'ai attendu avant de parler. Nous avons passé la journée à cet endroit. Voir et entendre des gobelins brûlés vifs c'est une chose, voir un compagnon de voyage mourir en est une toute autre.

Alors que la nuit tombait, je pris enfin la parole.
"Quatre personnes par tour de garde."

"Quoi?!"

"On ne me convaincra que ces êtres étaient au beau milieu de nul part par hasard. La bataille vient tout juste de débuter..."

À mon grand étonnement, personne ne chiala après cela.

Nous avons repris la route le lendemain matin et avons finalement retrouver nos le nabot et le géant à l'auberge.

L'endroit avait évolué. Ça ressemblait maintenant à un petit village. Cependant, notre étrange duo était à l'intérieur de l'auberge qui n'avait pas changé depuis mon dernier passage dans les environs.

"Qu'est-ce que vous fichez là!?" demanda Millenia.

"Tiens, vous voilà enfin!" fit Joker.

"Vous deviez trouver un guérisseur!" s'offusqua Aurica.

"Un guérisseur? Ah oui, ça me revient... Il va comment, le mec dans l'armure? Vous savez..."

"Il est mort, imbécile!"

"Pas la peine de crier..." fit-il en se prenant la tête à deux mains.

Isara passa le message à ceux qui étaient restés à l'extérieur de l'auberge : "Ils se sont saoulés au lieu de trouver un guérisseur."

"Ah non, c'est faux! se défendit le géant. C'est ce type. Enfin, je crois."

"De quoi parlez-vous?"

"On cherchait un guérisseur. On voulait le meilleur, vous comprenez. Ils ressemblaient tous à des charlatans mais l'un d'eux nous a proposé de goûter à son remède avant qu'on l'engage. Et je ne me souviens pas de la suite..."

"On pensait qu'il était aller vous voir, il s'est payé avant notre réveil. On était sur le point de vous rejoindre, promis. C'est étrange, on dirait que j'oublie de faire un truc habituel..." continua Joker, sérieux.

Je levai les yeux au ciel...

Je sortis avant que la tempête Montery ne s'abattit sur l'auberge. Je n'avais vraiment pas la tête à écouter le druide hurler. J'entendis vaguement Millennia renchérir, Joker ou Darek répliquer. Il me sembla qu'Isara et Navok s'en était mêlés également...
Je rejoignis Kyorn et Aurica au dehors. Ils semblaient perdus dans leurs pensées et bien loin de la scène probablement comique qui se déroulait à l'intérieur. Meinarth restait à l'écart, comme souvent, et Andrethel semblait muet depuis la mort de son révérend. Seul Grisek me lança un vague sourire en commençant à discuter des caractères qui régnaient dans le groupe. Je lui répondis en songeant qu'on venait de perdre un camarade, qui désirait à tout point rejoindre Scheissel, mais qui ne verrait jamais cette fameuse ville de chevaliers...

Ce fut Montery le premier à sortir de la taverne, en hurlant moitié : "Et maintenant en route. Et le premier qui me fait une remarque sur la couleur de son cheval ou qui demande une pause, on le dépose au prochain village. C'est bien compris ?"
La plupart des présents acquiescèrent sans broncher. Il y a des fois où l'on a pas envie de négocier face à Montery. Millennia avait bien dû tenter de le faire mais probablement sans résultat. En moins de dix minutes, nous étions tous en selle et prêts à partir, même Darek et Joker qui semblaient pourtant particulièrement mal en point...

Montery, Navok et Millennia menaient la marche silencieuse vers Scheissel. Ils ne desserraient pas les dents et semblaient particulièrement concentrés sur un seul objectif, celui de guider le groupe vers cette ville. Derrière les suivaient Kyorn et Aurica, qui échangeaient quelques mots à voix basse. Isara, Grisek et moi chevauchions à leurs côtés, mais aucun de nous ne parlaient. Meinarth était encore à l'écart du groupe. Enfin, Andrethel, Darek et Joker fermaient la marche. Ils semblaient aussi mal les uns que les autres, mais pas pour la même raison...

Après plusieurs heures de chevauché, nous atteignîmes le haut d'une colline d'où nous fûmes en vue de cette fameuse ville de Scheissel. Montery calcula qu'il nous restait environ une heure avant le coucher du soleil, et une demi-heure de route jusqu'à la ville fortifiée. Il nous expliqua alors son plan en nous confirmant que si quelqu'un s'avisait de ne pas le respecter, il avait toutes les chances de rencontrer son poing ou un équivalent.
Il s'agissait donc de rentrer calmement dans la ville comme tout groupe d'aventurier, demander un abri pour la nuit, puis voir s'il était possible "d'emprunter" le fameux Bouclier de Schei II. C'était peu probable, et dans ce cas nous serions contraints de le prendre nous même, mais dans la plus grande délicatesse. Le druide voulait éviter la perte d'autres membres du groupe...

Une quarantaine de minutes plus tard, nous arrivâmes aux portes de Scheissel. Mais à notre grande surprise, le pont-levis était baissé, et la herse ouverte. Nous avions plutôt l'habitude des sentinelles méfiantes qui nous bombardaient de questions à l'approche d'une nouvelle ville. Mais cette fois-ci personne n'était là pour assumer ce rôle. Juste le bruit du vent à travers les murs de la citadelle...

Après une légère hésitation, nous entrâmes par le pont-levis. Nous nous attendîmes à trouver des habitants, mais personne ne vint à notre rencontre, et aucun piège ne nous pris par surprise. Qu'avait-il bien pu se passer ici ? Nous nous regardions sans explication à donner. Puis nous prîmes le parti de nous répartir en plusieurs groupe pour explorer la ville, ce qui nous prit un temps réduit. Nous nous réunîmes vingt minutes plus tard sur la place centrale de la cité, avec une seule conviction : la ville était déserte...
Kyorn nous appris qu'il avait trouvé un accès ouvert menant dans le donjon central. Il était très probable que ce fameux bouclier soit caché à l'intérieur. La nuit tombait doucement, et le soleil rouge n'était plus que visible à moitié. Nous nous dirigeâmes vers ce fameux donjon, guidés par Kyorn et Aurica...

La recherche fut plutôt rapide. Le bouclier était dans une salle centrale, exposé dans une espèce de belle glace sur un piédestal. Sur ce dernier, on pouvait voir la mention "Bouclier du roi Schei II"...

"Bon, on le prend et on s'en va d'ici, il n'y a rien !" s'exclama Millennia. Kyorn vérifia qu'il n'y avait pas de piège, mais ne trouva rien. Finalement, Darek, visiblement énervé, cassa la vitre protégeant notre objectif et attrapa le bouclier à pleine main.
"Vous voyez, aucun problème !" nous lança-t-il.
"Maintenant, on s'en va..." renchérit Joker.

En peu de temps, nous fûmes dehors. C'était littéralement l'apocalypse. La citadelle qui semblait si belle jusqu'alors belle et radieuse n'était plus que ruine. La nuit était tombé, et le vent particulièrement puissant. Il pleuvait à saut. On aurait dit qu'on s'était trompé de porte en sortant et qu'on était arrivé à des kilomètres de notre point de départ...

Et le pire, c'était un bruit grondant qui montant de l'horizon. Il semblait venir de partout et nulle part à la fois. Je n'arrivais pas à réfléchir. Ce bruit s'amplifiait dans l'air et, accompagné du vent, reprenait un refrain incessant qui bourdonnait dans nos têtes sans que l'on ne puisse l'en faire sortir. Nous semblions tous médusés, ancrés dans le sol sans avoir une idée en tête. Ce fut un premier cri d'Aurica, un vrai cri de Terreur, imité quelques secondes plus tard par Isara. La Peur, la vraie Peur, celle qui nous glace le sang depuis les pieds jusqu'aux cheveux, cette Peur-là les avaient saisi jusqu'aux os. Puis Grisek, qui portait désormais le bouclier à son bras, reçut une première flèche dans le bras opposé, puis une deuxième dans l'épaule. Il chuta doucement, retenu au dernier moment par Darek le géant, qui attrapa le bouclier d'une main, plaça Grisek sur son dos, puis partit en courant vers l'entrée de la ville.
C'est alors que je Les vis. Ils se jetèrent sur nous, tournoyant dans les airs à une vitesse folle. Des fantômes, les mêmes êtres que celle qui avait retiré la vie d'Ullbreck. La pluie, le décor sinistre et la tempête qui s'abattait sur nous donnaient un air Epique à la scène. C'était effarant...

Je finis par reprendre mes esprits, en même temps que quelques autres autour de moi. Je me surpris à attraper Isara pendant que Meinarth se saisissait d'Aurica, et nous partîmes dans la direction de Darek et Joker. Nous courrûmes aussi vite que nous le pûmes, guidés comme toujours par le vaillant Montery, qui semblait ne pas être affecté par les événements. Nous semblions tous, nous autres, complètement effarés. Mais nous marchions sur les pas du druide, qui semblait savoir où il allait. Personnellement, je n'avais qu'une seule idée : celle d'échapper aux êtres derrière moi tout en continuant à porter la frêle Isara, à demi consciente...

Et puis tout à coup ce fut la forte herse et le pont-levis qui se dressèrent devant nous, ou plutôt ce qu'il en restait. A ma grande surprise, tout était resté ouvert, et il semblait que nous puissions toujours passer...
Montery se retourna alors vers nous, et nous lança :
"Et bien, mes amis, cette fois, je crois que nous avons définitivement rencontré ces spectes dont on nous a si souvent conté les exploits...Et il va maintenant falloir leur échapper..."

"Vils pilleurs, votre manque d'honneur vous laisserait-il succomber au trépas pour quelque trésor qui ne seront jamais vôtres?"

Encore sous le choc des derniers événements, je n'avais pas remarqué deux gardes en cottes de mailles qui étaient apparus d'un couloir à notre gauche. Ma première idée fut de les attaquer mais ils n'avaient ni l'apparence des spectres à l'extérieur et ils avaient un peu trop le patois des gens du coin. Il y avait déjà une sibylle qui m'énervait avec son vocabulaire, et voilà en plus tout un peuple qui avait à peu de choses près la même manie.

"Qui êtes-vous?" cria Millenia.

"La situation n'est guère à votre avantage. S'il est de votre désir de sauver vos vies, agréez de nous suivre en laissant vos armes bien en vue de notre vigilant regard."

Avec ses êtres mi-fantômes mi-humains à l'extérieur, nous n'avions guère le choix.

Nous suivîmes les gardes dans un dédale de couloir jusqu'à une chambre somptueusement décorée qui dissimulait un passage secret descendant dans une grotte creusée de main d'hommes.

Le temps de la descente, SirXenon leur raconta notre histoire et la raison de notre soi-disant vol du bouclier. Les gardes ne semblèrent nullement impressionnés.

"C'est toujours comme ça?" demanda Kyorn, pour briser le silence qui régnait depuis la fin du récit.

"Le triste spectacle auquel vous avez assisté n'est que le prélude de plusieurs heures d'atrocités. Les guerriers maudits apparaissent au moment même où le soleil nous laisse place à l'astre nocturne. Ils semblent dirigés les opérations. Puis des milliers de squelettes armés avancent jusqu'au château. Ils ont pillés les maisons et lancer de nombreuses attaquent sur nos fortifications. Tout est en ruine et pourtant ils n'entrent pas. Nous ne savons pas pourquoi. Et dès la première lueur de l'aube, ils disparaissent sans explication. Les bâtiments reprennent leur beauté d'antan et les seules preuves des ravages causés sont nos morts et les ossements des squelettes détruits. Fort peu de guerriers maudits périrent sous nous épées."

"Vous avez tentez des les détruire alors!" lança Kyorn.

"Par maintes et maintes occasion, Sir Elfe. Ces êtres sont apparus il y a trois semaines. Après la première nuit, nous croyions avoir vaincus le mal. Au prix de nombreux décès nous avions forcé l'ennemi à battre retraite. Mais le lendemain il en vint encore plus, et malgré tous nos combats, à chaque fois que l’obscurité tombe il en apparaît de plus en plus. Cette malédiction eut finalement raison de nous il y a 5 nuits et depuis nous soyons nos blessés dans l'espoir de tenter une nouvelle offensive. Ils en ont profiter pour détruire notre merveilleuse cité. Du moins la nuit..."

"Pourquoi ne pas avoir demandé des renforts? Vous avez des alliés dans les royaumes humains." remarqua Meinarth.

"La nuit, il est impossible de sortir de la ville. Les guerriers maudits apparaissent devant nos chevaliers et la fuite est impossible. Et aucun de ceux qui quittent durant le jour ne sont revenus. Nous les voyons galoper jusqu'à l'horizon et... Nous ne savons même pas si nos campagnes ont été mises à feu et à sang."

"Rassurez-vous, tout semblait normal! Les fermiers nous regardaient d'un air méfiant mais sinon je n'ai rien vu d'inquiétant" rassura Aurica.

"Mon coeur vous remercie de tenter de le soulager jeune demoiselle, mais vous oubliez que le jour et la nuit sont deux univers différents dans ce pays. Cependant, force m'est d'admettre que si vous avez vu de preux fermiers, c'est qu'ils sont toujours vivants... Verilian aurait donc raison. Ces morts-vivants veulent la cité."

"Qui est Verilian?"

"Un conseiller du roi qui s'est montré un tacticien remarquable au début de cette guerre. Il s'occupait des droits terriens et personne ne le prenait vraiment au sérieuxt. Le genre de chevalier qui avait préféré mettre son nez dans les livres plutôt que former la prochaine génération... Sans vouloir offenser sa majesté, si ce n'était pas de Verilian l'armée de Scheissel aurait été décimée..."

Sa voix ne cachait nullement son antipathie pour le personnage. Ou plutôt la jalousie; l’homme instruit avait finalement supplanté celui qui ne pensait qu’avec son bras.

Nous avons fini par découvrir une énorme grotte qui contenait un désolant spectacles d'enfants qui pleuraient, de femmes tentant de les réconforter et de soldats blessés. Il y avait peut-être cinq cent personnes là-dedans et rares étaient les hommes d'âge mûr en état de se battre.

"Allons voir le roi, il décidera de votre sort."

Difficile de penser que ce petit personnage trapu puisse être le roi de quoi que ce soit. Il n'avait même pas de cape, alors comment pouvait-il avoir la moindre classe sans son illustre couverture ? Voir un roi sans cape, c'était comme voir un chevalier sans cheval, ou un nain sans barbe...ridicule ! Pour être honnête, on aurait facilement pu le confondre avec un simple guerrier, aussi banal et dépourvu de cape, de cheval ou de barbe qu'un autre. Quoique pour ce qui est de la barbe, il était sur le bon chemin, ça devait faire au moins un semaine qu'il ne s'était pas rasé, et on distinguait très nettement l'apparition d'un bouc aux reflets dorés, de la même couleur blonde que sa chevelure miel, un peu dégarnie et mal peignée. Mais ce roi-sans-cape était, malgré son age plutôt avancé, d'une vigueur hors du commun, de celle qu'on les hommes actifs, motivés, et qui jouiront d'une santé de fer toute leur vie, qui ne seront jamais affectés pas la moindre maladie, jusqu'à la semaine précédant leur mort, ou leur entourage les verra se flétrir et finir par s'éteindre, d'une manière si soudaine et si prompte qu'on ne pourrait pas prévoir l'âge de leur mort.

Nous avions traversé la sombre grotte jusqu'à un renfoncement, de la taille d'une chambre, et n'ayant pour unique mobilier qu'une chaise élimée. Vu le style de ce drôle de monarque, on eût pu aisément conclure que cette ébauche de tabouret faisait office de trône, dans ce trou de roche qui faisait office de salle de trône, avec aussi peu de succès. Des peaux de bêtes étaient tendues sur les parois humides et froides de la caverne, tentant d'imiter les tapisseries des luxueux châteaux que nous avions eu le privilège de visiter auparavant. Si la ville laissait penser qu'elle était habitée de gens civilisés, cette grotte n'aurait pas pu abriter autre peuple qu'une horde de barbares, tant la grossiereté de l'habillement était frappante. Le seul personnage qui rappelait à cette toile si peu originale la civilisation dont elle avait besoin était une sorte d'ecclésiastique à la robe sombre, grand et maigre, desséché par les années qu'on pouvait compter au vu des rides qui striaient son visage aux joues creusées. Il restait cependant effacé dans la pénombre que formait un coin de cette ébauche de pièce froide et humide.

Le roi-sans-cape, qui faisait les cent pas devant sa chaise, s'arrêta soudain à la vue de notre groupe hétérogène et demanda sèchement, d'une voix rauque :

"-Eh bien, qui sont encore ces gens ? Des fantômes de plus ? des gitans venus demander l'hospitalité ? Comme si nous n'avions pas assez de soucis comme ça !

-Monseigneur, prenez au moins la peine d'écouter leur histoire et les raisons pour lesquelles ils sont en possession du bouclier de Schei...

Et SirXenon raconta une nouvelle fois notre périple, mais cette fois d'une façon bien plus posée, plus habillée et plus agréable à écouter que les quelques bribes discontinues qu'il avait lancées au garde. Je suppose que c'est de cette façon qu'il faut parler à un roi, même s'il n'a pas de cape...à moins qu'il ne faille en faire encore plus s'il avait une cape, il va falloir que je me renseigne là-dessus... Après que SirXenon ait conclu en demandant de l'aide au moins pour la nuit, ce roi-sans-cape médita quelques instants avant de refuser d'une façon un peu emportée.

"-Non. J'ai assez d'hommes pour repousser les morts-vivants tout seul, mais je n'ai pas besoin de gêneurs dans mes pattes

Millennia s'emporta aussitôt

-Quoi ? Votre ville est anéantie, vos hommes sont aussi peu nombreux que leur courage leur fuit, vous êtes contraints à vivre dans une grotte sale et humide qui pue la moisissure à plein nez, et sitôt que quelques renforts potentiels arrivent, vous les chassez, comme ça, sans même nous accorder une nuit de répit ? Vous allez nous balancer à la merci de ces fantômes, comme on jetterait des os de lapin à un chien galeux ? Mais c'est quoi votre problème ?

-Tais-toi.

Montery n'avait pas eu besoin de hausser la voix pour la faire taire. Il avait prononcé ces simples mots si sèchement et si autoritairement qu'ils avaient fait le même effet qu'une gifle à la guerrière. Le silence qui s'en suivit fut si profond qu'on entendait au loin les pleurs des enfants, par dessus le crépitement des torches. Il reprit :

-Cela dit, il est vrai qu'on pourrait vous être utiles, alors, s'il vous plait, arrêtez de vous voiler la face et de vous mentir à vous-même en refusant d'admettre que vous puissiez avoir besoin d'aide.

Montery avait fait là un effort considérable pour ravaler son excédement et pour parler posément, et prendre le roi dans le sens du poil avait l'air d'avoir porté ses fruits. Il appela auprès de lui le vieux en robe, qui devait sûrement être Verilian. Ils murmurèrent entre eux quelques instants, puis le roi conclut.

-Soit. Vous profiterez de cette nuit pour vous reposer, parce qu'à vous voir, vous en avez grandement besoin. Mais la nuit prochaine, vous nous aiderez à combattre les morts-vivants, et vous resterez avec nous jusqu'à ce que nous ayons gagné...ou que nous soyons tous massacrés jusqu'au dernier.

Ce pays me tombait sur les nerfs. Je croyais que voir la cité assiégée pourrait avoir eu un effet positif sur les habitants mais il n'en était rien. SirXenon raconta encore une fois toute l'histoire, au roi cette fois, en employant le parler local. Je décidai alors d'aller explorer ces grottes et je tombai sur les écuries où les chevaux me racontèrent des choses beaucoup plus intéressantes.

La stratégie de SirXenon sembla échoué lamentablement. Je n'ai pas eu le début de la conversation mais lorsque je revins le roi nous demandait, dit d'une façon très élégante, certes, de repartir au matin, et probablement nous faire massacrer comme tous ceux qui avaient tenté de le faire.

Millenia nous fit une de ses crises journalières, se compara à un bataillon entier.

Étant encore le... ahhh ça me dégoûte de dire ça... disons.... le guide du groupe, je levai les yeux au ciel avant d'intervenir...

Je leur offrit notre aide. Faire avouer à un roi qu'il a besoin de renfort c'est une chose, que de simples guerriers leurs offrent leur bras de bon coeur en est une autre beaucoup plus noble. Du moins, de son point de vue.

Malheureusement, il ne comprit ma remarque qu'à moitié. Il accepta notre aide mais il ne nous considérait que comme une poignée de soldats...

Ils avaient perdus la majorité de leurs hommes, les ennemis arrivaient sans cesse en plus grand nombre, et il croyait qu'une dizaine de combattants de plus changerait tout.

Une folle envie de décimer à moi seule ce qui restait de l'armée du roi de Scheissel m'envahit. Comment faire comprendre à un roi et ensuite à sa bande de généraux sans cervelle que ce n'est pas avec une belle cavalerie qu'ils vaincraient une armée de morts-vivants dont le nombre augmentait chaque jour? Si quelques milliers d'hommes supplémentaires arrivaient de nulle part ça serait différent, mais là ce n'était que ce groupe de jeunots sans expérience.

"Voilà qui est fort aimable à vous messire... Mais dites-moi, avez-vous tenté la ruse pour vaincre cet ennemi inhabituel?"

"La ruse?" fit le roi, un peu méfiant. La ruse n'est jamais un moyen très noble de vaincre.

"Ces squelettes doivent bien venir de quelques parts... Si cet endroit était neutralisé..."

"Ils se lèvent du sol, c'est tout."

Je n'ai pas réussi à cacher entièrement le soupir de découragement qui suivit. Ce peuple ne croyait pas en la magie. Encore moins en une magie qui pourrait oeuvrer pour le bien. Je n'étais pas pour leur raconter que je savais me métamorphoser, qu'un autre avait des pouvoirs sur les éléments ou je ne sais quoi. On nous aurait mis au bûcher. Il y a bien les auras de paladin qu'ils acceptent mais pour eux c'est de la spiritualité, pas de la magie. Je demandai donc à mes compagnons d'expliquer au bon roi le principe de nécromancie pendant que j'allais me changer les idées.

À mon retour, ils se chamaillaient encore sur la futilité de telles croyances.

"Sir, ad-met-tons que ce que nous disions est plausible, il y aurait donc un nécromancien derrière tout cela pour invoquer ces squelettes." tenta Kyorn.

"Ma patience a ses limites! Allons, admettons, pour vous faire plaisir."

"Avez-vous banni un magicien? Un peuple de magiciens vous serait ennemi?"

"Nul acte de magie n'a été répertorier depuis des siècles."

Les quinze minutes suivantes furent une discussion sans intérêt. Les choses devinrent enfin intéressantes lorsque le vif du sujet fut abordé: où ce nécromancien pouvait trouvé autant de sujets à faire sortir de terre?

"Oui il y avait une grande plaine non loin d'ici où de grandes guerres de jadis furent livrées. Des myriades d'hommes y perdirent la vie. Depuis, une forêt de frêles arbres vit naissance."

Puis il se lança dans le récit de quelques unes de ces batailles.

"S'il y a un nécromancien, il ne doit pas être loin de cette plaine.. Enfin, forêt...." supposa SirXenon.

"Il y a un temple voué à la mémoire de toutes les bonnes gens de Scheissel là-bas. Cela ferait un fort bel endroit pour se vouer à la magie" lâcha un des conseillers du roi.

"Vous n'allez pas vous y mettre vous aussi, Verilian!" s'indigna le roi. "Croire en cette magie noire qui serait maîtresse de nos terres."

"Laissez-nous tenter de prouver notre théorie, majesté." dis-je pour mettre fin à cette joute verbale qui me donnait mal à la tête. Lors de la prochaine bataille, nous tenterons une percée pour rejoindre cette forêt. Si nous avons raison et que les cieux nous laissent la vie sauve, nous aurons raison de ce vil magicien. Et s'il en est autrement, ce ne sont pas une poignée de guerriers comme nous qui ferions une différence au combat, entouré des plus nobles et courageux chevaliers du monde."

Le roi nous dit de façon fort courtoise sa façon de penser sur les probabilités que nous avions de traverser les lignes ennemies et de parcourir une dizaine de kilomètres pourchassées par des squelettes et les étranges créatures qui ont tué Ulbreck. Tout cela pour tomber sur un vieux temple désert. Mais il eut l'extrême gentillesse de nous laisser nous suicider sans trop discuter.

Lorsque le souverain s'éloigna, le conseiller s'approcha de nous.

"La peur que vous ne sachiez convaincre Sa majesté commençait à s'emparer de mon être. Venez avec moi, il faut établir un nouveau plan sur cette prochaine bataille."

Ce Verilian ne m'inspirait pas confiance. Il semblait un peu trop doté de jugeote pour ce peuple...

"Il faudra donc partir demain matin, juste après l'attaque des ombres. Avec un peu de chance les guerriers les repousseront cette nuit. Quant à vous, n'allez pas vous battre, cela ne nous amènerait que des blessés supplémentaires. Vous n'avez pas forcément l'air très organisé, mais vous semblez hautement plus intelligent que ces preux chevaliers qui composent notre restant de peuple..."

Verilian avait dit ses derniers avec un brin de cynisme qui devait certainement nous montrer son manque de passion pour les guerres. On en a connu de nombreux comme ça, ils sont souvent essentiels pour gagner les batailles, mais malheureusement ont une assez piètre opinion de tous ceux qui y périssent...
J'avais beau regarder et écouter attentivement Verilian, le soupir de Montery lorsque Verilian avait supposé que nous étions hautement intelligent ne m'avait pas échappé. Sacré vieux druide, celui-là au moins ne changera jamais...

La nuit fut rude, et je ne pus encore une fois fermer l'oeil. A croire que le guerrier que j'étais avait définitivement perdu sa meilleure amie Solitude lors de son mariage. Ou peut-être était-ce elle qui me gardait éveillé, pour pouvoir m'admirer plus longtemps à la lumière du feu que nous avions allumé dans un coin sombre du repaire des villageois...

Je m'assoupis un temps sans m'en rendre vraiment compte. De ces sommeils qui ne comptent pas vraiment au réveil. Au plus croit-on avoir dormi quelques minutes. Alors que je suis dans l'incapacité totale de savoir combien de temps j'ai pu rester dans l'autre-monde, celui où tous les rêves sont encore permis...

J'ouvris les yeux encore une fois parmi les tous premiers levés. Peut-être l'aventure qui m'appelle, peut-être aussi la rudeur du Passé qui m'empêche de me rappeler comment rêver sans tourment et sans croire que le Vrai Mal existe sur Terre...

Le jour semblait se lever. Seuls Meinarth était assis dans un coin, en train de méditer j'imagine, et Navok. Même si pour ce dernier j'avais un gros doute sur le fait qu'il dorme vraiment. Vu les faibles réserves de la ville, il était hors de question d'aller partager leur nourriture. Je me convaincs donc de prendre quelquechose dans mes réserves personnels pour combler le trou qui me servait d'estomac, puis de sortir prendre l'air...

Montery m'accueillit dehors avec un vague : "Le sang a coulé ici cette nuit..."
Effectivement, une dizaine de cadavres jonchaient le sol. A croire que les chevaliers ne seraient pas nombreux lors de la prochaine nuit...Il faudra faire vite...
Montery me sortit de ma rêverie en me disant que le soleil allait bientôt apparaître à l'horizon, et que les esprits étant partis, il était temps pour nous de partir. Je l'observais un moment, partagé entre l'idée qu'il avait discuté toute la nuit avec les chevaux, ou qu'il avait participé à la bataille, mais je ne pus me décider sur l'une ou l'autre des versions. Même après toutes ces années, j'avais du mal à le cerner. Ma seule certitude était qu'il avait au moins aussi peu dormi que moi. Le Passé qui nous rappelle à lui...

Je retournai à l'intérieur après avoir respiré l'air vicié empli par l'odeur d'une bataille venant de s'achever. J'avais un groupe à réveiller...
Mais à ma grande satisfaction, ils étaient tous levés. Navok m'accueillit en me disant qu'il avait guetté le jour et avait fait réveillé tout le monde quand celui-ci avait pointé son nez. Puis il partit vers l'entrée du repaire...Encore un qui aura très bien pu participer à la bataille de cette nuit, mais qui ne lèvera jamais le voile sur cette question...

Millennia râlait une nouvelle fois dans un coin, pour je ne sais quelle raison, et j'avais une très faible envie de le découvrir. Kyorn étant avec Aurica, et Meinarth, que je continuais à appeler ainsi en moi-même tant que je n'avais pas une véritable explication, semblait toujours peu enclin à entamer une discussion. Je me dirigeai donc vers Verilian avec qui j'entamai une tranquille conversation sur les anciens joyaux que révélait cette ville. Schleissel...Ca sonnait déjà comme un problème alors qu'on n'y avait pas encore mis les pieds. J'aurais dû me douter...

Nous nous retrouvâmes tous dehors assez rapidement, car Montery et Navok se dépêchèrent d'aller presser les autres. Seule Millennia tentait de nous faire croire que nous n'avions aucune raison d'aller aider ce peuple voué de toute façon à la mort et qu'il fallait qu'on parte vers les trésors promis le plus rapidement possible. Le Géant menaça de la faire taire à coup de poing, et elle fut obligée de stopper pour un temps ses lamentations...
De son côté Verilian annonça officiellement qu'il venait avec nous. Il avait selon lui donner ses conseils au Roi pour les prochains jours, avec plusieurs scénarii envisageables. Il nous serait au moins un guide dans la forêt, et un précieux allié pour se sortir d'une embuscade...

Nous nous attendions à trouver des squelettes et des zombies partout sur notre route, mais nous épées restèrent sur leur fin. La fameuse forêt de Scheissel n'était pas très loin, et nous nous enfonçâmes sans amertume alors qu'elle s'assombrissait à chaque pas. Verilian était en grande discussion de magie en compagnie d'Isara qui semblait totalement emballée par la discussion. C'est vrai qu'avec nous, elle avait plutôt peu l'occasion d'aborder un sujet qui semblait lui tenir finalement à coeur !

Et tout à coup, Verilian nous arrêta en nous montrant devant nous le fameux temple dont le Roi nous avait parlé. Nous étions encore derrière des arbres, plus ou moins bien dissimulés, en guettant ce vestige du Passé qui se trouvait au beau milieu d'un semblant de clairière. Je vois mal comment nous aurions pu le trouver sans l'homme à la toge, qui avait finalement bien fait de nous accompagner !
Après avoir passé de longues minutes à observer autour de nous pour vérifier le calme des lieux, nous nous décidâmes à avancer légèrement. Guidés par Kyorn, ce furent Aurica, Darek et Joker qui avancèrent les premiers. Après leurs signes encourageant, Millennia, Navok, Grisek, Andrethel et moi les suivirent. Meinarth et Montery, habitués des derniers rangs, puis Verilian et son inséparable Isara fermèrent la marche.

Les premiers entrèrent dans le temple, qui ne semblait pas très grand, mais dont la végétation cachait une bonne partie du temple. Je rentrai à mon tour, mon épée dégainée. Elle brillait faiblement, comme si des âmes noires se trouvaient à quelques pas d'ici. Alors que mes compagnons se dirigèrent groupés vers le centre, je remarquai un petite ouverture sur ma droite, grâce aux reflets de mon épée. Je réussis à me frayer un passage, mais me retrouvai deux pas plus tard face à un épée mur infranchissable. Je cherchai une trappe ou quelquechose dans le genre, mais avec le peu d'éclairage et mon habileté légendaire rien de voulut me sourire. J'allai revenir dans la pièce centrale pour avertir mes compagnons et m'enquérir de leurs trouvailles, quand j'entendis un violent bruit, comme une chute, suivi de cris dans tous les sens, et d'un rire plutôt désagréable à entendre. C'était quoi ça ?
Je regardai par l'ouverture, pour m'apercevoir que le plancher du temple n'était plus. A la place régnait un trou béant par lequel on pouvait entendre les voix faibles de mes compagnons. Je me tournai alors vers l'entrée du temple, où trônait trois ombres. Je distinguai Verilian, entouré d'une aura bleue et qui riait en clamant que nous étions pires que ses compagnons de la ville. Et face à lui, Montery et Meinarth semblait être les deux seuls à rester sur leurs pieds. Je plissai les yeux et vis que Verilian tenait en réalité Isara par le cou. Il cria brutalement à ses deux adversaires de reculer s'ils ne voulaient pas qu'il tue sa future femme. Il ajouta que désormais il aurait une descendance ou je ne sais quoi et que le Mal pourrait s'abattre définitivement sur la ville qui avait trahis son clan de sorcier des années auparavant...
Une bien jolie histoire si nous n'avions pas été dans cette position si inconfortable ! Je n'avais plus que deux choses à faire. La première était de prier, prier pour mes camarades en bas, prier pour ceux qui faisait face à un terrible magicien qui nous avait tous trompé, prier pour invoquer une aura spirituelle sur eux pour qu'il puisse mieux lui faire face. La seconde, c'était de trouver une solution pour sortir d'ici, avec la puissance d'un toit de pierre au-dessus, des murs autour de moi, et le chemin du retour effondré derrière moi...

J'espère que tout va bien en bas...Je ne peux pas distinguer qui parle, mais je suis au moins certain qu'il reste des survivants !
Mon Dieu, aidez-nous...

Je l'avais bien dit qu'il n'était pas suffisamment imbécile. Je savais bien que c'était louche. Mais non, personne ne m'écoute.

Restait à découvrir si le vrai Verilian gisait je ne sais ou s'il avait vraiment vécu une double-vie depuis des années. Bien que ça ne changeait rien à la situation.

Avec SirXenon que j'entrevoyais dans l'ouverture du mur qu'il avait eu envie de fouiller, avec Meinarth à mes côtés qui n'était pas le plus mauvais candidat pour moi je présume, avec un paquet d'os brisés dans ce trou, avec ours qui était resté à l'extérieur mais qui devait avoir compris la situation grâce aux cris et sans oublier un nécromancien ayant une otage à l'intérieur d'un champs de force, la situation était un peu précaire.

Il fit respirer une poudre à Isara en lui disant que c'était mieux que ça la protégerait de ce qui allait arriver. Le résultat fut qu'elle perde connaissance... Du moins j'espère...

"Merci messieurs dames, mais je crois que j'en ai assez de ce personnage." ricana Verilian

Son aura bleue sembla exploser. Je me cachai les yeux. Une grande chaleur et un nuage de poussière sembla me frapper quelques secondes. Je sentis Meinarth tomber vers moi et l'attrapai, même si ça m'obligeait a endurer cette poussière.

Lorsque tout s'est enfin dissipé, j'ai constaté que Meinarth s'était évanoui. Et il n'y avait plus aucun gémissement venant du trou béant dans le plancher.

Le nécromancien sembla aussi surpris que moi pendant une seconde mais retrouva vite son aplomb. Ma bardiche était prête à le faucher. Il y a plusieurs années, je l'aurais peut-être fait à la première occasion. Mais les choses avaient changées...

"Et bien, ça c'est surprenant..." fit Verilian.

Je sentais qu'il portait son attention vers le trou... Mais je ne sentais pas qu'il était sur le point de me lancer un quelconque sort.... Et je ne savais pas quoi faire à part gagner du temps...

"Qu'est-ce que tu leur as fait?"

"Oh rien de mal. Au contrair,e personne ne leur a jamais fait un si beau cadeau.... Il est d'ailleurs étrange que tu n'en avais pas besoin..."

"Réveille-les!"

"Désolé, vieillard, mais je n'en ai pas envie. Et évidemment, me tuer ne servirait à rien. Si ça peut te rassurer, ils peuvent se réveiller quand bon leur semble... Mais ils ne le feront pas. Ils resteront avec un grand sourire sur le visage jusqu'à leur mort."

"C'est quoi cette histoire!"

Je ne savais vraiment pas quoi faire. Isara était à ses pieds mais il ne lui portait aucune attention pour le moment. Le tuer était une idée mais si ça ne les réveillait pas, ils resteraient peut-être ainsi éternellement. Il regarda un instant Meinarth puis retourna son attention vers le trou.

"Depuis que j'ai découvert comment animé les squelettes et invoquer un certain type de démon, je fais kidnappé tout ceux tentant de fuir le royaume. Je les amène ici et les vide de leur force vitale. Et il est bien connu que le bonheur augmente davantage la vitalité que la haine ou le désespoir. Je sens beaucoup de force en eux, ils me seront très utiles pour achever d'asservir la cité et ensuite me construire un empire où les morts règneront sur les vivants... Une fois qu'ils seront vides, tes compagnons finiront par mourir de soif mais ça sera une mort heureuse si cela peut te réconforter ahahah."

J'allais avoir à le tuer... Je ne voulais pas...

Il regarda un instant en direction de SirXenon.

"Oh mais voilà qui règle tout... Je suis désolé, vieux druide, mais j'ai une poignée de chevaliers à massacrer et une impératrice à couronner. Tu considères avoir déjà le bonheur? Et bien je connais quelqu'un pour qui tu en fais parti. Désolé mais ça ne sera pas à toi de décider d'en sortir ou non, profites bien des derniers moments, vieux druide."

Il fit un mouvement du bras droit. J'abaissai aussitôt ma bardiche et lui tranchai, ce qui lui fit causer un grand cri. Cependant, la poudre qu'il avait lancée en ma direction m'a atteinte et je me suis senti chamboulant. J'ai cru sentir un grognement et un bruit de bagarre avant que je ne m'évanouisse...

Un coup de coude dans les côtes me réveilla.

"Tu te fais vieux de t'endormir en conduisant. Une chance que les chevaux connaissent le chemin."

C'était Mirane... J'étais à bord de notre carriole, avec nos chevaux qui trottaient allègrement... Et Ours qui nous suivait. Qu'est-ce que c'est que ça?

Devant mon incompréhension, Mirane soupira et me dit "Ce soir tu devrais dormir tôt au lieu de boire la moitié de la nuit comme la dernière fois."

Elle eut un de ses petits rires qui me font toujours si chaud au coeur et me fit une accolade suivit d'un baiser sur la joue. C'était Mirane... Comment était-ce possible.

"Allez, ouvre les yeux et soit présentable. Nous arrivons."

Arriver? Mais où. Je regardai autour de moi et je reconnaissais le payasage.... Oui....

En effet, une quinzaine de minutes plus tard, on apercevait le petit cottage de SirXenon et Polgara. Du moins ça y ressemblait. Il y avait cependant des bâtiments supplémentaires et le cottage avait subi au moins deux agrandissements...

Alors que nous approchions, une ribambelle d'enfants sortirent et nous assaillirent. Deux autres sortirent de la grange. Ils devaient avoir 10 et 12ans, quelque chose du genre. Je n'étais pas un pro en enfants. Le plus vieux était entrain de devenir un homme et qu'à voir son allure, on voyait que Xenon lui avait appris un truc ou deux.

Une petite aux cheveux exactement ceux de Polgara fonça sur Ours et lui fit un gros câlin. Ours lui caressa la tête avec son museau. Les autres enfants nous accueillaient et posaient 1000 questions.

"Raconte-nous une histoire!" me demanda une autre fille.

"Oh oui!" fit un autre.

"Les enfants, laissez votre oncle et votre tante descendre avant tout."

"Mais il avait promis de nous en raconter une, maman!"

C'était Polgara. Elle était exactement comme à Karak-Kadrin mais un peu plus enceinte. Et un sourire sur son visage que je n'avais pas vu depuis son mariage...

Mirane alla lui faire la bise alors que SirXenon sortait d'un hangar.

"Je me suis dit que je pouvais bien attendre que vous ayez passé le comité d'accueil avant de me pointer."

C'était SirXenon... Rayonnant, lui aussi.

Je descendis et il me fit une virile accolade.

"Euh... ça peut paraître stupide comme question... Mais c'est quoi, ÇA!?"

Il fut surpris par ma question avant de comprendre...

"Ah, et bien c'est encore ta femme qui a influencé la mienne! J'ai dû bâtir cela pour ranger les outils, même ceux qu'on utilise toujours dans le même bâtiment! Une chance les enfants m'ont aidé. Je te raconte pas que les pierres commencent à être rare dans le coin."

C'était entrain de devenir une vraie ferme, cet endroit... Avec toute une relève pour les aider... Mais qu'est-ce que je raconte moi?! SirXenon n'a pas d'enfant! J'étais face à un nécromancien et me voilà ici avec Mirane, Ours, et la famille Xenon-Polgara au grand complet. Pourtant... tout semblait correct, non? C'est ainsi que les choses sont censées être. Ce n'est peut-être qu'un rêve que je faisais en chemin. Mais si oui, quel rêve. Ahhhhhhh!!!

"On peut aller jouer avec Ours, oncle Monty?" fit la Polgara version miniature. D'ailleurs elle dégageait un faible aura magique....

"Euh bien sûr, s'il en a envie... Je parie que ça va lui faire du bien."

"Alllez Ours!"

Ours se pencha et la fit embarquer sur son dos, ainsi que 3 autres des enfants et partirent...

"Alors, tu entres Montery ou tu veux que Xenon te fasse visiter avant?" me lança Polgara, avec Mirane qui lui chuchotais quelque chose à l'oreille que je préférais ne pas savoir. Et les enfants restant avaient réussis à me faire promettre au moins une histoire durant la soirée.

Vraiment, tout ceci était vraiment bizarre.

"Qui est-ce qui m'a choisi une bande d'incompétents pareil ? Well..."

Je contemplais avec un profond sentiment de désarroi le spectacle de la série de Héros endormis à même le sol de cette forêt qui devait être si confortable. Qu'est-ce que c'était que cette histoire de Verilian, qui, dès la deuxième petite quête, avait déjà supprimé toute la bande ? Incroyable ! Il faut toujours tout faire ici..
Tout d'abord sauver des Enfers un preux chevalier. Et maintenant, le réveiller lui et sa troupe de guerriers pour qu'ils puissent décapiter un vieux mage aux pouvoirs presque défaillants...
Si j'avais été dans ce groupe, rien de tout cela ne serait arrivé ! Moi au moins, de la volonté j'en ai ! Ce n'est pas parce qu'un soi-disant Dieu m'a réduit sous une forme quelconque d'esprit de je ne sais quoi que je ne suis pas encore Sarn Elstalyr, le redoutable Seigneur d'Oryval...

Tout en enchaînant ces pensées aussi négatives que délicates, je tentais de trouver intérieurement une inspiration qui aurait pu sauver la quête, et par conséquent mon honneur. Puisque je n'oubliais pas qu'il était en jeu, étant donné que j'avais à les surveiller...
Je ne pus entendre Faith arriver...

"Alors, Seigneur, un problème ?
-Moi, non. Jamais. Trois démons majeurs et un Dieu ne m'ont pas posé de problème, ce n'est pas un groupe de 12 somnambules qui va me gêner !
-Que se passe-t-il en bas ?
-Ce qui se passe ? Trois fois rien, un vieil imbécile qui s'amuse avec nos chers amis à jouer au jeu de celui qui dort le plus longtemps. Well, apparemment il a perdu, je vois qu'il est toujours réveillé...
-Ce n'est pas ce que je vois...
-Alors pourquoi me poser la question ? Quand on sait ce qui se passe, ça ne sert à rien d'aller le demander aux autres ! Je ne vois pas ce qu'il y a de plus à espérer !
-Et bien, j'attendais...
-Ca je m'en moque ! Mais j'imagine que le patron des lieux va encore dire que c'est à moi de mettre un terme à ce petit jeu !
-En effet...
-Je n'ai qu'une question, chère demoiselle...enfin, cher esprit de demoiselle : je n'ai pas le droit d'agir directement, c'est bien ça ?
-C'est bien ça...
-Well, ça n'a donc pas changé. Cependant, j'ai le droit de leur parler comme nous l'avons fait la dernière fois, donc de rentrer dans leurs esprits ?
-On peut voir ça comme ça...
-Alors dans ce cas je peux rentrer dans leurs rêves ! Let's go ! A plus tard !
-Euh, ça par contre..."

Mais je n'écoutais déjà plus, concentré sur ce que j'avais à faire désormais. L'heure des contemplations était terminé, place à un peu d'action. Un peu seulement, soit, mais hors de question de rester planté dans mes nuages pendant que ces incompétents en bas deviennent narcoleptiques...
Et surtout, hors de question qu'un simple vieil homme en toge réussisse à me faire échouer une mission ! Alors, ai-je quelque chose de compliqué ou de hors-la-loi à réaliser ? Peu importe. Moins je suis dans les règles, et plus ça me rappelle mon Passé. Alors mieux c'est...

La manoeuvre que j'avais à réaliser n'était pas si compliquée. La maîtresse des lieux m'avait appris à la réaliser sans trop de problème. Il suffisait de se concentrer sur un esprit pour créer une liaison avec ce dernier...
C'était plutôt étrange. Moi, l'esprit fort, dont l'esprit n'avait jamais réussi à être pénétré, même par des démons premiers, j'allais à mon tour m'introduire dans les pensées de quelqu'un...Ce que par conséquent j'avais combattu toute ma vie !

Je regardai encore une fois en Bas. Mon esprit s'avançait sur les plaines, tel un vagabond sur un destrier si rapide que les paysages alentours semblent irréel. J'étais arrivé au temple, et m'approchais d'un Sir Xenon en plein sommeil. C'était celui qui me poserait le moins de problème. Rentrer dans son esprit, je l'avais déjà fait...
Et puis c'est aussi celui que je connaissais le mieux, et j'arriverai certainement à lui faire entendre raison plus vite qu'aux autres...

Il dormait bien, l'homme en noir. Très profondément, de sorte que même un troupeau de jongleurs et d'éléphants ne l'aurait pas réveillé en passant à deux centimètres de ses oreilles. Puissant somnifère le Verilian...

Il y a quand même des fois où j'aimerais bien m'endormir de la sorte. Là-haut on ne dort plus...Mais ce n'est pas fait pour me réjouir. J'ai toujours apprécié le sommeil, même si j'en ai rarement fait un grand usage. Tout le problème lorsqu'on a un rang à tenir. Mais c'est quand on n'a plus dans les mains ce qu'on aime qu'on en ressent le besoin et l'envie...Quel problème...

Tout se passa très vite. Trop vite pour que l'imbécile de faux sorcier se rende compte de quelque chose. Brutalement, avec une manoeuvre que je n'aurais pu décrire, je m'introduisis dans l'esprit de mon ancien protégé...Dans son rêve...

Je retrouvais à peu près les sensations d'une personne normale. C'est tout l'avantage des rêves ! On en fait ce qu'on veut...Et puis si un esprit arrivait aux yeux des autres sous cette forme, j'imagine assez mal la tête que pourraient avoir les autres en question...Ni même l'importance qu'ils lui accorderaient...
En attendant, je pouvais désormais, et pour le temps d'un rêve, marcher, courir, peut-être même manger, dormir et me battre ! J'avais retrouvé mon apparence d'avant, avec l'armure, la cape d'Oryval, mais à une exception près...Je n'avais plus mon épée Athrad...

Je m'avançais sans avoir trop à réfléchir vers la seule maison qui existait à des kilomètres à la ronde. Au moins, je savais où habitait ce fameux chevalier ! Puisque j'étais venu lui parler intérieurement...Juste là...

Une cariole était stationnée devant. Je vis dans un coin un ours qui jouait avec...de enfants. Des enfants ? Pourtant Sir Xenon n'a pas...Well, ça ne va pas le faire si j'oublie au bout de cinq minutes de marche que cet endroit pré-fabriqué par un cerveau endormi n'a rien de commun avec la réalité...
C'est vrai que la maison que j'avais visité précédemment avait désormais bien grandi, que le chevalier et sa femme avait désormais un bon nombre de modèles réduits à élever...et un ours et une cariole ? Soit...

J'entendis des voix de femmes dans la cuisine. Elles étaient au moins deux. Ca ressemblait totalement à un dialogue. Et si je pus reconnaître Polgaraa, l'autre m'était inconnue. Anyway, je n'ai jamais eu une oreille réputée dans mon glorieux Passé...
Well, les femmes, ça ne m'intéresse pas, et c'est tout à fait ce qu'il me faut éviter, ce qui retiendra le paladin à son rêve. Je venais de comprendre le plan de Verilian. Leur offrir leur paradis à travers une utopie...Pour mieux les supprimer ensuite ?
Mais je n'entendais pas le propriétaire des lieux...Peut-être était-il sorti ?

Je partis vers les bâtiments plus récents...Et cette fois-ci j'entendis celui dont je venais d'emprunter le rêve...Mais je fus tout aussi surpris de constater qu'il n'était pas seul...Et la voix qui lui répondait, je pouvais aisément la reconnaître...
Well, je n'ai plus le choix...Maintenant il faut avancer, quelque soient les obstacles...

"Well, bonjour messieurs, enchanté...
-Qui êtes-vous ?"

Sir Xenon avait déjà brandi le premier objet qui lui passait sous la main. Ce devait être une sorte de pelle, mais à en croire la forme qu'elle avait, il ne devait pas être très efficace dans la confection d'outil...

"Well, du calme ! On se connaît sans se connaître. Je suis le Seigneur Sarn Elstalyr d'Oryval...Je sais que ça ne vous dit rien à tous les deux, mais n'ayez crainte, je suis là en ami...Je n'ai même pas d'arme d'ailleurs !
-Que voulez-vous ?
-Oh, très simple ! Que vous redescendiez sur Terre...Oui je sais, ça parait absurde comme ça, mais je vois pas trop d'autres mots...Même si, à la réflexion, je ferais bien la même chose, moi..."

Sir Xenon semblait aussi étonné par mon entrée plutôt originale que soucieux de préserver la vie utopique que Verilian lui avait fabriqué. Devant sa non-réaction, et son incompréhension, ce fut le druide qui s'avança...
"Je ne sais pas qui vous êtes, mais j'ai déjà entendu votre voix...Et si ma mémoire est encore bonne à mon âge, ce n'est pas moi qui avais choisi de l'entendre...Vous êtes le mari de Faith, n'est-ce pas ?
-Quoi ? Montery, c'est le mari de Faith ?
-Well ! Ca ne va pas non ? Vous croyez que j'ai que ça à faire de me marier ? Déjà que j'ai à veiller sur un groupe... Et puis tant qu'à faire, si j'avais à passer ce cap difficile, ça ne serait certainement pas avec une demoiselle aussi...compliquée dirons-nous !
-Sur ce point on est d'accord. Mais ça ne nous dit toujours pas qui vous êtes en réalité, et ce que vous venez faire ici, à des lieues de toute civilisation, avec votre accent si prononcé..."

Well, c'est bien parce que j'ai une mission. Un druide qui se plaint de mon accent...On aura tout vu ! Sir Xenon nous regardait tour à tour, sans tout comprendre de la conversation. Ca n'en devenait que plus comique...

"Mon cher druide, vous avez raison sur un point, je viens du même monde que Faith. Et c'est bien ma voix, et mon soi-disant accent que vous avez entendu au cours de notre léger entretien dans votre habitation forestière...
-Mais qu'est-ce que c'est que cette histoire ? Montery, tu fais de la magie maintenant ? Et qu'est-ce que Faith vient faire là-dedans ?"

Lui, visiblement, il avait déjà tout oublié. Délicat, par conséquent, d'arriver à quelque chose dans ces conditions. Mais le druide semblait pouvoir prouver qu'il lui restait une parcelle d'intelligence dans son cerveau torturé. Anyway, même s'il avait trop de caractère pour qu'on ait pu devenir des amis, je suis sûr que si l'on avait été dans le même groupe, il m'aurait copieusement faire rire...Mais les autres se seraient probablement tous pendus au premier arbre venu...

"Non Xenon, je ne fais pas de magie, et je ne sais pas ce que Faith vient faire là-dedans, ni même...
-Rappelle-toi, vieux druide, rappelle-toi. Faith est un esprit, elle t'a parlé pour te donner une nouvelle quête. Rappelle-toi ! Ca a pris un bon moment avant de te convaincre...Tu y as pris part, de même que ce chevalier ici présent !
-Tout cela je m'en souviens. Mais je suis étonné de votre ton avec moi, je ne me souviens pas qu'on était devenu amis...
-Tiens, un ironique de plus en ce monde ! Quoi qu'à la réflexion, depuis que je l'ai quitté, c'est le seul que j'ai vu...
-Qu'est-ce que vous racontez encore ?
-Well, peu importe. Si tu te souviens de tout ça, vieux druide, tu te souviens du reste. De Verilian, tu t'es battu contre lui. Tu t'en souviens également ?
-Mais comment sais-tu tout ça ?
-Well, en effet, le tutoiement ça fait bizarre. Well, passons ! Je t'ai dit que je venais du même endroit que Faith, je connais toutes vos aventures depuis le départ. La seule chose que je ne peux pas faire, c'est vous dévoiler ma mission...Même si je l'ai déjà fait plus tôt, mais vous étiez trop concentrés sur quelle arme vous alliez attraper pour vous en rendre compte..."

Le druide avait une sorte de pioche faite maison dans la main, tandis que le paladin avait toujours sa soi-disante pelle. Le duo était très impressionnant à voir, et ma foi, peut-être que la plus jeune fille de mon hôte passager aurait pu avoir peur...Et encore...

"Well, si tu te souviens de ça, comment as-tu pu croire une seconde à ce rêve ?
-Quel rêve ?
-Le Monde dans lequel tu crois vivre depuis que tu es arrivé chez Sir Xenon !
-Je n'ai pas compris comment j'étais arrivé là...Je me souviens du combat, j'ai un trou noir, et...maintenant, je suis là...
-Tu t'es laissé avoir l'ami ! Tu vieillis ! Où est donc passé le druide qui opposait une résistance à tout ce qui l'entourait, y compris les défenseurs du bien...
-Veux-tu goûter à ma pioche pour savoir si je vieillis ? Je ne sais même pas qui je dois croire dans cette histoire ! Un guerrier à cape grise avec un accent de je ne sais où que je vois pour la première fois, ou le bonheur de mon compagnon de route depuis des années !
-On voit que tu ne me connais pas, druide. Tu pourras apprendre qu'il faut toujours m'écouter...Qu'as-tu à perdre ?
-Mais absolument tout ! Encore une fois, j'ai tout à perdre ! J'en ai marre de vos querelles interminables, vos histoires de bien et de mal. J'ai déjà suffisamment donné, non ? Je n'en peux plus ! J'ai envie moi aussi d'avoir une vie de famille, de rester avec ma femme jusqu'à ma mort ! Et surtout pas de continuer à combattre ce qu'il y a aux alentours !"

Je reconnais qu'il avait beaucoup plus de répartie que Nuit. Aussi étonnant que ça puisse paraître, je dus marquer une pause avant de lui répondre. J'avais un problème, je devais défendre une cause à laquelle je ne croyais pas. Les histoires de bien et de mal, j'y avais été embarqué contre mon gré par un stupide archange. Jamais je ne m'y serais aventuré sinon...

"Ecoute-moi, l'ami. Je comprends ce que tu ressens. Ici, le problème n'est pas uniquement de sauver le Monde, c'est de vous sauver vous. Vous êtes tous pitoyablement endormis sous les arbres d'une forêt, à la merci d'un stupide mage qui va probablement vous tuer d'un instant à l'autre. Alors ton rêve va très vite être interrompu, et je préfèrerai que vous mourriez avec les honneurs, si vous avez réellement à mourir, qu'assassiné dans votre sommeil par un pauvre sorcier...
-Et pourquoi dois-je te croire ?
-Mais, fie-toi à tes souvenirs ! Rappelle-toi que j'étais là avec Faith, que Faith est du bon côté !
-Faith ne m'a pas souvent apporté de bonnes nouvelles, et encore moins de bons conseils...
-Je savais que tu étais au moins aussi borné que moi, mais visiblement tu l'es peut-être encore plus. Pourtant, le Seigneur Sarn Elstalyr...
-Elstalyr...
-Qu'y a-t-il, Sir Xenon ?
-Rien, simplement qu'Elstalyr est l'étoile qui m'a toujours guidé dans tous les moments difficiles que j'ai eu, depuis mon plus jeune âge...
-Well, dis-moi vieux druide, pourrais-tu me croire si je te dis que ton ami me regarde et que je le guide dans tous les moments difficiles qu'il a eu, depuis son plus jeune âge ?
-Je n'y comprends plus rien ! J'étais en train de me battre, et me voici avec un Sir Xenon bricoleur qui construit des nouveaux bâtiments et un Seigneur qui débarque d'on ne sait où !
-Tu sais que Sir Xenon n'a jamais eu d'enfant, Montery...
-Et alors ? Tu veux qu'on les tue pour l'occasion ?
-Well, je voudrais juste que vous me suiviez, que vous quittiez ce faux monde dans lequel vous allez tristement mourir ! Sir Xenon, tu ne peux pas me le refuser...Souviens-toi de l'étoile, que tu ne reverras pas ici...Et toi, druide, tu sais que ce monde n'est pas le tien, je le sens, prenez ma main..."

A ma grande surprise, Sir Xenon s'exécuta, après avoir posé sa pelle. Le druide râla de son côté, maugréant des mots peu compréhensibles, puis finit par déclarer qu'il le faisait uniquement pour ne pas laisser son ami seul...

Il leur était impossible de se réveiller seul, ou alors au prix d'une totale persuasion, et on en était loin. Alors j'allais les emmener avec moi hors de ce rêve, pour qu'il reprenne leur place parmi les vivants...

Je me concentrai. Tout aurait marché magnifiquement, si juste au moment de quitter le rêve, la voix de Polgaraa se fit entendre..."Sir Xenon !"
Ce dernier lâcha instantanément ma main. Mais le druide ne put en faire de même, et je quittai ce rêve avec lui, et lui seul...

***

Terminé, les sensations humaines. Place à la réalité, moi dans ma bulle, loin au-dessus du reste, loin au-dessus de ma cité légendaire d'Oryval...
Je regardais en bas. Montery semblait être revenu à lui, mais Sir Xenon dormait toujours, comme je m'en doutais...
Sa femme était revenue une seconde trop tôt. Ca n'avait pas suffit à déconcentrer le druide, mais la simple pensée de laisser sa femme en arrière avait été beaucoup trop délicate pour mon ancien protégé. Sacré sentimental, celui-là...

Verilian avait disparu. Mais des traces indiquaient clairement sa direction dans la forêt. Il me serait facile de le retrouver, grâce à ma vision panoramique de là-haut.
J'attendis que le druide se lève, appuyé sur sa bardiche. Puis je vins directement à son esprit, comme je l'avais fait plus tôt avec son ami...

"Well, c'est encore moi ! Comme tu le vois, tu es seul. Sir Xenon est resté dans son rêve, mais je ne t'ai pas menti. Tu es de nouveau dans la réalité. Comme tu peux le voir, tes amis dorment paisiblement, dans leurs rêves respectifs. Mais tu vas pouvoir les en sortir, je vais te donner un petit coup de main..."

Je ne sais pas ce qu'il me répondit, ni même s'il m'avait vraiment répondu. Tout ce que je savais, c'est qu'il me fallait retrouver Verilian, pour que complice sur Terre puisse le tuer et délivrer le groupe. Rien que ça...

Je me mis alors en chasse, reprenant le chemin par lequel le sorcier avait dû partir. Il n'était pas très loin, à peine une lieue au Nord. Mais à ma grande surprise, il portait Isara sur son dos. A croire qu'il avait d'autres projets pour elle. C'est vrai qu'elle était plutôt jolie...
Je m'empressai alors d'aller le rapporter au druide, qui avait déjà pris la piste du sorcier. Il se changea en loup, pour augmenter sa rapidité et sa discrétion.

Ce fut assez efficace. Quelques minutes plus tard, un temps qui me sembla radicalement court vu d'en haut, Montery était sur ses traces. Il le contourna en coupant à travers la forêt, revint sur le sentier, mais cette fois-ci pour lui faire face. Il se retransforma en homme, prêt au combat qui l'attendait, et se posta derrière un arbre pour user de l'effet de surprise. Intelligent. Verilian allait y arriver d'un instant à l'autre. Je me dis alors qu'une petite aide pour être utile...
Je m'approchais suffisamment de ses oreilles, enfin, mon esprit le fit, pour lui souffler quelques mots avec la voix la plus aigüe possible. Je ne pouvais pas entrer dans son cerveau, car ses qualités de sorcier l'auraient tout de suite alarmé.
Mon plan fonctionna. Il releva la tête surpris, et posa Isara sur le sol, soucieux. Puis il lui demanda si elle avait parlé, et finit par lancer en relevant la tête :
"J'ai vraiment cru qu'elle parlait...
-Et c'était une grave erreur !"

Montery venait de surgir de son arbre, la bardiche levé, et de la baisser violemment vers la gorge de Verilian, qui tomba brutalement sur le sol, inerte...

Isara ouvrit alors les yeux instantanément, comme si elle sortait d'un cauchemar...

Je venais encore de sauver le groupe...

Je crois que le nom de Sarn Elstalyr hantera encore les mémoires du Temps pour un moment...

Un bruit assourdissant me tira de ce qui avait dû être un sommeil très profond mais dont je n'avais aucun souvenir particulier. Seule une agréable sensation de bien-être enivrait mes sens, telle la douce vague de chaleur d'une brise d'été. Le reste...Je n'avais dans la tête qu'un grondement sourd exprimant l'écho du violent bruit de tout à l'heure comme un pivert frappant l'arbre de son bec. Ce n'était pas agréable...

Je finis par reprendre doucement mes esprits. Assez tout du moins pour retrouver où je me trouvais et ce que j'y faisais. J'étais dans un coin du temps vers lequel nous avait conduit Verilian. Ce sorcier...Un traître ! Mais où était-il ?

Je me mis à regarder autour de moi en mettant debout, et quelle ne fut pas ma surprise de croiser dès lors le regard d'Ours, le fidèle et incomparable compagnon de mon ami le druide Montery ! Ce regard expliquait probablement le bruit entendu précédemment. Je ne sais qui a fait tombé ce mur, mais Ours devait être impliqué dans cette histoire. Toujours est-il que j'étais désormais délivré de ma prison provisoire, car Ours se tenait exactement à l'endroit où précédemment j'avais trouvé un mur me coupant le retour vers le Monde extérieur...

L'animal fit demi-tour, et je le suivis, à travers l'amoncellement de gravas qui jonchaient le sol. Le passage était étroit, mais il valait la peine d'y passer. Je fus accueilli de l'autre côté par Meinarth et Montery, qui m'aidèrent à me relever en m'expliquant brièvement la situation...

Verilian le traître avait été tué par les soins de l'ami Montery, et nous autres nous étions réveillés brutalement de notre rêverie à ce moment. Le "nous" incluait pour le moment Isara, Meinarth et moi. Les autres...Les autres ! Je me souviens maintenant ! Verilian avait fait s'effondrer le sol sous leurs pieds, causant probablement quelques problèmes...En espérant qu'ils ne soient pas tombés trop bas...

L'esprit encore embrumé, je suivis tant bien que mal mes compagnons du moment jusqu'à l'entrée du temple, dernier point accessible avant la fosse dans laquelle se trouvaient nos compagnons. Visiblement, certains étaient réveillés, car nous entendions des bruits de voix en-dessous, mais nous ne distinguions rien. Montery se hasarda à hurler quelque chose du genre : "Est-ce que tout va bien ?", même si nous redoutions tous la réponse. Cependant, ce fut la très forte voix de Darek le géant qui nous parvint, celui-ci demandant clairement à quiconque voudrait l'entendre si quelqu'un avait une torche. Il eut été compliqué pour nous de leur envoyer quelque chose...

Navok lui répondit alors, en demandant où était Isara, et si celle-ci pouvait faire apparaître du feu entre ses mains. Elle répondit qu'elle était en haut, et qu'elle allait le faire. Elle avança alors les mains en avant, et des flammes en sortirent. Je n'étais toujours pas familier de ce genre de magie, même si j'avais vu bien pire, et avec le temps cela m'avait plutôt déplu...

Cependant, le feu sortant de ses doigts descendit directement vers le trou de nos compagnons, et comme par magie enflamma un bout de bois. Nous pûmes enfin distinguer nos compagnons en bas, en tout cas au moins l'ombre de Navok qui se tenait debout au centre de ce qui devait être une crypte ou quelque chose comme cela.

"C'est toi qui as fait ça ?" demanda Montery à la sorcière.
"Non ! J'ai juste lancé du feu, et...
-C'est Navok ! Il est élémentaliste, il peut manier le feu s'il en trouve..." grommela Meinarth. Décidément, nous avions des sorciers plutôt étonnants dans ce groupe...

"Ils sont plutôt bas...Je dirai une dizaine de mètres...Et je n'ai pas envie de me casser la voix pour hurler à nouveau ! Quelqu'un a une idée pour les faire sortir de là ?"

Montery semblait à bout de nerf. Je sentais qu'il s'était passé quelque chose que je n'expliquais pas. Pourquoi avait-il tué Verilian alors que nous dormions ? J'espérais qu'il répondrait à mes questions en temps voulu. En tout cas, cela avait semblé le fatiguer. Mais pour une fois, j'avais quelque chose en tête...

"J'en ai peut-être une. Montery, dis-moi que tu as une corde !
-Bien sûr, je prends toujours soin d'en avoir une à ma ceinture, et je suis le seul à ce que je sache !
-Pas cette fois-ci ! J'ai retenu la leçon...Et nous dirons que je suis devenu plus sage avec le temps...Quoi qu'il en soit, assemblons les, nous devrions atteindre nos compagnons !"

Mon stratagème porta ses fruits. Nous enroulâmes la corde autour d'Ours, nous lançâmes la corde dans le trou obscur, puis nous organisâmes. Meinarth, probablement le plus fort d'entre nous, se plaça juste devant Ours, puis ce fut moi et enfin Montery. Isara, quant à elle, se mit à observer les autres monter pour pouvoir les aider une fois arrivés au sommet.

Le premier à passer fut le Joker. Celui-ci monta sans encombre, puis accepta la main tendue d'Isara pour atteindre la terre ferme.

"Xenon...As-tu pensé aux eventuels blessés ?
-Et bien...Les autres attacheront la corde autour de leur corps, et nous tirerons !
-Et Darek ?
-Il montera le dernier ! Avec un peu de chance, à nous tous, nous pourrons tenir la corde ! A condition qu'il ne soit pas blessé..."

Montery avait répondu deux fois à ma place, mais cela m'arrangeait. Car je n'avais pas de réponse à offrir à Meinarth...Celle du druide avait été les bienvenues !

Andrethel, Grisek, Millennia et Navok montèrent sans encombre. Cependant, ce dernier, qui avait laissé sa torche au géant, nous annonça que la seule blessée était Aurica. Kyorn allait donc l'attacher autour de la corde, pour que nous la remontions.

"Heureusement que ce n'est pas ce gros balourd de Darek !" s'exclama gaiement Joker, ce à quoi Millennia répliqua sèchement que si cela avait été le cas on aurait laissé en bas notre ami blagueur pour tenir compagnie au géant et que nous aurions continué notre quête comme si de rien n'était.

Montery coupa court à la dispute pour réorganiser les troupes afin de tirer Aurica, mais ce ne fut pas si compliqué. Nous étions désormais nombreux, et l'alchimiste n'était pas la plus lourde du groupe, loin de là.

Nous la hissâmes finalement jusqu'au sommet, puis relançâmes la corde pour Kyorn et Darek. Isara étendit Aurica sur le côté, dans l'herbe, en trouvant un vêtement pour lui mettre sur la tête.

"Elle n'a pas eu la chance de tomber sur Darek ! Andrethel et Grisek l'ont fait, et eux ils ont eu raison ! Ha ha ! Moi par contre...
-Toi la ferme !"

La deuxième réponse venait de Navok, qui semblait excédé à son tour. Montery de son côté, qui devenait le plus calé d'entre nous en médecine, étant donné son penchant pour les herbes, partit à son tour au chevet de la guérisseuse.

"C'est quand même dommage, c'était le seul médecin de la bande, et elle a besoin d'un médecin ! C'est bizarre la vie non ?
-Par pitié, assommez-le" implora Isara.
"C'est vrai qu'il commence sérieusement à me taper sur les nerfs celui-là" lâcha à son tour le druide, qui avait pourtant gardé son calme jusque là.

Joker, vexé du manque de considération envers son humour plutôt déplacé, finit par grimper sur un arbre pour bouder en solitaire. Nous retournâmes quant à nous à nos occupations initiales, à savoir, tenir la corde pour permettre à Kyorn de retrouver la terre ferme.

Ce fut une autre histoire pour Darek. Ours râlait considérablement, et glissait de temps à autres, comme nous tous. Montery dut même revenir nous aider, laissant Isara seule, pour éviter le pire. Mais à la surprise générale, le géant prit son temps mais finit par arriver en haut de la colline sain et sauf. C'était inespéré, mais finalement accompli !


Aurica était sans connaissance. Montery revint vers nous, qui étions assis en silence sur les marches du temple, laissant Kyorn au chevet de son amie :
"Elle a plusieurs os brisés, ne parvient pas à reprendre connaissance, et son souffle est très faible. Ca m'ennuie pour Kyorn, mais je pense qu'il ne lui reste que quelques minutes à vivre. Nous ne pouvons la transporter, je n'ai pas le savoir pour y changer quelque chose, et je pense que même elle ne saurait le faire. Je ne sais si...
-NON ! AURICA ! FAITES QUELQUE CHOSE !"

Je n'avais pas entendu Kyorn hurler comme ça depuis des années. La plupart des présents accoururent vers l'épicentre des cris, nous laissant seuls, Meinarth, Montery, Andrethel et moi. C'est à ce moment précis que la sybille apparut de nulle part, nous faisant sursauter tous les quatre. Mais la transmission était incroyablement mauvaise...

"Mes amis, l'h...l'heure est gr...grave...Quelqu'un...s'attaque à moi...mais pas...directement...Il m'affai...blit et je ne...sais si je pourrais continuer...longtemps à vous guider. Je ne sais...pas qui...c'est mais il est très...p...pp...puissant... Prenez garde...Vous devez partir maintenant...pour récupérer les...les...autres objets..."

L'image disparut...Puis, quelques secondes plus tard, elle revint, un peu plus nette :
"Vous...avez déjà le bouclier, le casque et l'épée...Il vous manque les bottes... les gants, les anneaux....et..."

L'image disparut à nouveau. Il nous manquait le nom du dernier artefact. Quand il réapparut, le personnage que nous avions face à nous, qui parlait désormais tout à fait normalement, semblait encore plus exténué que précédemment...

"Ce sont...mes dernières paroles...J'en ai peur...Ce sorcier...Me terrasse...Je n'en peux plus...Il va me vaincre...Partez au Sud...Oui...Vers le Sud...Maintenant...Vous devez...Agir vite...Temps presse...Les bottes...Au Sud...Le désert...La direction : La Porte de...La Porte de..."

L'image s'éteignit dans un sorte de râle peu rassurant. Nous attendîmes un instant mais rien ne revint. Ce fut Montery qui reprit la parole :

"Quelqu'un peut me confirmer ce qu'elle vient de dire ? Je ne suis pas sûr d'avoir tout compris...Non, je suis même sûr de ne pas avoir tout compris !"
-Elle est étrange cette femme. Je ne sais pas si on doit lui faire confiance..." s'exclama étrangement Andrethel. Nous le regardâmes tous les trois, puis Meinarth parla :
"Elle veut qu'on aille au Sud, pour aller chercher la suite...Qu'étais-ce ? Ah oui, les gants !
-Non, ce sont les bottes. Elle a parlé de désert à traverser et d'une histoire de porte. Pour le désert, c'est normal, c'est ce qu'il y a de plus vers le Sud. La Porte, par contre...A moins que..."

Les autres me regardaient. Je tentais de rassembler les fragments de ma mémoire, mais l'âge pesait sur mes choix et mes mots. Je ne parvenais pas à me souvenir en quoi une Porte au Sud pouvait m'être familière.

"Tu as raison Xenon, ce sont les bottes, et non les gants, je m'en souviens maintenant. Cependant, nous aurons également à trouver des gants et des anneaux...
-Et quelque chose d'autre, qu'elle n'a pas pu préciser..."

Montery, qui semblait bouillir, s'emporta légèrement :
"Et bien voila ! On fait comment pour se repérer maintenant ? Plus de contact avec la sybille...Je savais que je m'embarquais dans quelque chose de stupide, j'en ai la preuve ! Alors on part vers le Sud, au hasard, sans vraie direction ? Et on compte sur quoi ? La chance ? En plus je vois d'ici le tableau, Millennia qui ne voudra pas nous croire, Kyorn et Navok silencieux comme la mort, les deux cinglés qui vont continuer de faire n'importe quoi...Et vos gants et anneaux, on les trouve comment ?"

Personne n'eut d'idée pour répondre. Personnellement, je ne pensais qu'à une chose : on devait avoir affaire à un ennemi coriace. Mais surtout, nous avions enfin la preuve qu'il y a un ennemi face à nous. Jusqu'alors, ce n'était que des démons isolés. Il y a donc vraiment un but à tout cela...Quelqu'un d'assez intelligent pour attaquer le guide de notre groupe, et nous priver de notre contact avec le Monde Céleste...Faith pourrait-elle nous venir en aide cette fois-ci ?

Ce n'était pas un moment agréable. En plus de la frustration quant à la sybille, mélangé à une petite dose d'inquiétude, nous devions patienter respectueusement alors qu'Aurica allait mourir d'un instant à l'autre. Kyorn était inconsolable mais lui a tenu la main jusqu'au dernier moment. Puis nous avons ramené son corps à Scheissel où elle reposera à jamais.

Sur la route du retour nous avons croisé quelques squelettes immobiles ou encore qui errait sans but dans une direction, obéissant aux dernières parcelles de magie qui les habitait. Certains se démantibulaient dans un son désagréable qui troublait un quasi-silence que seul les oiseaux et nos armures empêchaient.

Les soldats de Scheissels avaient subi encore une fois de lourdes pertes mais la chute des squelettes et la disparition des étranges créatures-dém ons qui les accompagnaient leur avait fait retrouvé le moral. Ce royaume prendrait au moins une génération avant d'être de nouveau sur pied. Et l'idée de revenir les protéger d'une puissance maléfique voulant prendre avantage de la situation me donnait mal à la tête.

Je crois qu'ils n'ont jamais cru à l'histoire du nécromancien. Je suppose que la version officielle sera qu'un imposteur avait habilement ursupé l'identité de Verilian et menait les morts-vivants à la bataille.

On nous avait longuement remercié et nous n'avions pas eu besoin de redemander à avoir le bouclier. C'était donc avec un item de set supplémentaire et encombrant que nous allions reprendre la route. Jusqu'à ce qu'un vieux conseiller vienne nous demander si nous désrions consulter des documents de leur bibliothèque royale qui pourraient nous aider dans notre quête. SirXenon voulut s'informer sur la porte de je ne sais quoi qui était de l'autre côté du désert. J'ignore pourquoi mais une fois à la bibliothèque, j'ai eu l'idée de sortir un vieux parchemin qu'un certain orc; un des êtres les plus sages n'ayant jamais foulé le sol, avait déposé sur mon chemin.

"Pouvez-vous déchiffrez cela?" demandai-je au conseiller en lui tendant le parchemin.

Il l'observa un moment avant qu'une étincelle n'éclaire son regard. "Ça me rappelle quelque chose. Vous me le laissez un instant?"

Une ennuyante heure plus tard à discuter de moyens de franchir ce désert, le vieux bibliothécaire revint.

"Ça ressembait trop pour être une coïncidence. Nous avions trouvé cela il y a plusieurs années lorsqu'une caravanes d'orcs du désert étaient passée sur nos terres. Des parchemins troués semblaient ridicules mais en voyant le votre, j'ai fait le lien. Regardez, en les superposant dans un certain ordre, cela a effacer certaines parties de votre parchemin et à créer d'autres signes. Je sais ce que c'est mais je ne peux pas le déchiffrer..."

Je pris la pile de parchemin. Je n'ai jamais été très doué pour lire ce langage mais certains mots de débutants ne pouvaient pas être liés de cette façon... "Un jour, cet objet déterminera tout." C'était donc ça!"

"Donnez-moi votre itinéraire de voyage. Et vous faites-copier ces parchemins au plus vite et trouer les aux mêmes endroits. Sauf le mien, évidemment. Je voys rattraperai plus tard!" m'écriai-je en me retournant vers les autres.

"Mais où vas-tu?" me demanda Millienia, de sa voix exaspérante.

"Je retourne à Karak-Kadrin."

Le temps que tous eurent crier plus forts que le précédent, un scrible me ramena les copies des documents troués et l'original de mon parchemin.

"Je ferai vite, alors tâchez de ne pas vous faire tuer. Andrethel, tu veilles sur Ours(je lançais à Ours un regard qui voulait tout dire). On se rejoint d'ici quelques semaines."

La voix d'un de mes compagnons s'éleva.

"Il n'est pas question que je te laisse partir seul!"

"Pas question, tu me ralentirais."

Alors ça je ne m'y attendais pas. Je devais réagir. Mais je n'avais pas de temps à perdre. J'ai eu une brillante idée...

"Très bien, tu peux venir avec moi, mais tu feras ce que je dis..."

Tout s'était passé beaucoup trop vite pour que mon esprit, à peine remis de la magie de Verilian, puisse attraper tous les sous-entendus de ce qui venait de se produire.

Je réussis à interpréter que Montery avait compris quelque chose des parchemins qu'il avait sur lui. Mais à part ça...

Karak-Kadrin... Ce nom me fit mal au coeur, comme s'il venait d'un passé enfoui tellement loin derrière moi...

Et cette voix, qui s'était élevé de nulle part, pour accompagner Montery. Kyorn l'inconsolable avait parlé à ma place. J'étais probablement celui qui aurait dû suivre mon dernier ami dans ce groupe, plutôt que d'essayer de remettre dans l'ordre les événements précédents. Mais je sentais bien que depuis que Polgaraa avait quitté le groupe, je n'étais plus tout à fait moi-même.

Le désordre régnait dans le groupe. Ou ce qu'il en restait. Montery et Kyorn préparaient leurs affaires pour partir d'une minute à l'autre, sous les sarcasmes de Millennia qui jurait qu'ils nous abandonnaient car ils pensaient notre quête sans espoir. Darek et le joker étaient occupés à une sorte de cache-cache dans la bibliothèque, ce qui faisait hurler le vieux bibliothécaire à qui s'était adressé Montery. Meinarth et Andrethel semblaient se disputer pour je ne sais quoi. Comme d'habitude, Grisek et Navok restaient silencieux, un dans chaque coin de la pièce. Isara, quant à elle, lisait des livres dans un coin.

Je finis par m'avancer, comme pour me sortir de la bulle dans laquelle je venais de rentrer :
"Je vous suis, messieurs. Après tout, nous sommes les rescapés de la même Histoire, nous avons probablement à marcher ensemble."

Montery s'arrêta net, alors qu'il repliait convenablement la corde que nous avions utilisé pour sortir nos amis du gouffre dans lequel ils étaient tombés. Il m'attrapa par le bras pour m'emmener à l'écart.
"Je suis désolé, Xenon, mais j'ai toutes les raisons de refuser ta participation. Déjà, parce que ce groupe a besoin de toi. Tu es le combattant le plus expérimenté, peut-être aussi celui qui a le plus la tête sur les épaules. Si nous voulons continuer notre quête, il faut que tu restes dans ce groupe.
- Je comprends. Mais je serai également utile avec vous. Il ne faut pas vous perdre, sinon nous sommes perdus...
- Attends, ce n'est pas tout. Si tu reviens avec nous... Tu sais comme moi que tu ne repartiras pas..."

La phrase resta en suspens. Nous nous regardâmes un moment, puis je lui donnai une franche accolade, signe que j'avais compris. Il avait raison. Et le fait qu'il m'ait pris à l'écart, lui qui n'était pas du genre sentimental, montrait qu'il croyait profondément aux deux arguments avancés. Si je revenais voir Polgaraa, je n'avais probablement aucune chance de revenir dans cette quête. Alors que cette aventure avait encore besoin de moi.

"Je pars avec Kyorn. Sir Xenon restera avec vous, et il vous guidera comme il sait si bien le faire. Prenez soin de vous.
- Prends soin de toi, Montery."

A ma grande surprise, personne d'autre ne répondit. Je me sentis brutalement nostalgique de l'époque bénie à laquelle nous avions un groupe plus uni. Le souvenir de quelques guerriers comme Dragon, Geizer et Thor m'attrista un instant. Puis Kyorn et Montery partirent, en direction de Karak-Kadrin.

"Compagnons, rendez-vous dans une heure aux portes de la ville ! Nous partons vers le Sud. Prenez des provisions, surtout en eau. Et de quoi vous réchauffer la nuit, car les nuits des déserts sont froides. A tout à l'heure..."

Je pris le parti de lire quelques livres pour essayer de retrouver quelle porte pouvait se trouver au Sud du Monde, mais rien ne voulait plus rentrer dans mon cerveau. J'étais trop absorbé par mes souvenirs du Passé, par le nom de cette ville dans laquelle se trouvait ma bien-aimée. Et c'était difficile de faire plusieurs choses à la fois. Xenon, tu vieillis... Il est temps de te reprendre, c'est désormais à toi de guider le groupe...

J'arrivais un peu en avance aux portes de la ville. Sans surprise, Navok et Meinarth s'y trouvaient déjà, mais aucun des deux ne parlaient. Une idée me vint brutalement en regardant ce dernier. Je ne dis rien, mais lui adressai un léger sourire, qui sembla le troubler un instant. Puis il reprit son attitude fermée habituelle, alors que Navok semblait avoir à nouveau émigré vers son univers imaginaire.

Millennia arriva à l'heure pile, bientôt suivie du reste du groupe. Il fallut simplement attendre Darek et Blagueur, mais ce ne fut pas tellement un problème. Ce temps mort me permit de vérifier que tout le monde avait pris de quoi survivre dans le désert.

Les habitants de Scheissel nous offrirent deux ânes bien chargés en provisions, en dédommagement de notre quête. Nous acceptâmes sans rechigner cette aide inattendue. Puis ils nous fêtâmes grandement alors que nous donnions le signal du départ.

J'attendis de ne plus être en vue des tours de la ville, puis demandai à mes compagnons de s'arrêter. Je détestai ces exercices de prise de parole, même quand c'était nécessaire. Mais pour le coup, celui-ci était sacrément obligatoire. Tout le monde me regarda, puis s'approcha de moi pour mieux entendre, ce qui m'arrangeait beaucoup, n'ayant pas développé un grand amour non plus pour les hurlements.

"Compagnons, comme vous le savez aussi bien que moi, je n'ai ni l'âme ni le charisme d'un guide ou d'un meneur. Cet intérim devait rester très court, pour notre survie à tous. Au lieu de moi, je vous propose de suivre quelqu'un qui a ce rôle de leader dans le sang. Quelqu'un qui saura se montrer digne de cette mission, qui saura nous diriger vers la lumière ou dans l'obscurité, car il l'a toujours fait avec brio et réussite. Et cette personne, bien que cela puisse surprendre certains d'entre vous, c'est... "

Je fis un rapide tour autour de moi. La plupart des membres m'écoutaient sans trop se poser de question, sachant bien que je ne parlais pas d'eux. Grisek, Andrethel ou Darek, par exemple. Millennia, par contre, s'était redressée pendant mon discours, cherchant mon regard à chaque instant. Je ne lui laissai pas le loisir de croire qu'elle avait gagné mon respect. Pour cela, il faudrait qu'elle fasse beaucoup plus que son travail au sein du groupe pour le moment.

"C'est... Meinarth..."

L'intéressé me regarda éberlué. Son capuchon lui cachait presque le visage entier, mais on voyait ses yeux qui hésitaient sur le sentiment qu'ils devaient produire. Je repris la parole :

"Je n'en dirai pas plus sur les raisons qui me portent à croire que c'est le meilleur chef que nous pourrions rêver d'avoir. S'il souhaite un jour conter son histoire, il le fera. Mais ce n'est pas à moi de le faire. S'il est d'accord pour assumer le rôle de guide de notre expédition, et s'il accepte de retirer son capuchon pour que nous puissions enfin le voir, tout ira pour le mieux."

Je savais qu'autour de moi, étant donné le départ de Montery et Kyorn, personne ne connaissait le vrai visage de Dardomez. Si ce nom évoquait force et respect à n'importe quel guerrier, mes compagnons ne pouvaient imaginer qu'il se trouvait dans notre groupe depuis le départ.

"Qu'en penses-tu, Meinarth ?
- J'accepte."

Il baissa alors son capuchon. Un geste bien insignifiant pour tout le monde, mais qui signifiait tant pour moi. Dardomez, mon compagnon du passé, celui qui avait toujours guidé notre groupe face au Mal, Dardomez était revenu d'entre les morts, pour se battre avec nous. Maintenant, nous pouvions mettre le cap au Sud. Il n'y avait plus de raison d'avoir peur de ce qui pourrait nous y attendre...

Meinarth prit alors une grande inspiration, regarda à nouveau le groupe, tous, les uns après les autres, puis prit la parole à son tour :
"Merci Xenon pour ta confiance. Il est vrai que nous sommes de vieux amis, mais... le temps n'est pas toujours un allié. Je vous mènerai là où il le faudra. Mais il vous faudra donner le meilleur de vous-mêmes. Nous sommes neuf, et nous nous connaissons très peu. Nous avons au moins quatre excellents combattants au corps à corps avec Millennia, Sir Xenon, Grisek et Darek. Joker et Andrethel peuvent nous servir avec leur vivacité et leur capacité à tuer sans se faire voir. Les pouvoirs de Navok et Isara nous seront également très utiles pour le combat à distance. A nous tous, nous pouvons faire mal à tous les ennemis qui croiseront notre route. Mais nous devons nous unir. Alors, je vous pose la question, à tous les neuf, maintenant. Il nous reste visiblement quatre objets à trouver. Souhaitez-vous terminer cette quête, ou vous arrêter en route ?"

Tout le monde resta silencieux un moment, un peu hésitant. Le problème, c'était toujours pour le premier qui prenait la parole. Darek et Blagueur se reculèrent et mirent à discuter bruyamment ensemble. Et ce fut étonnamment Andrethel qui attaqua :
"Je n'ai pas compris quel objet il fallait récupérer en sortant d'ici, expliqua-t-il.
- Je crois que ce n'était pas vraiment la question... commença Isara.
- Montery et Kyorn sont des lâches qui nous ont abandonnés ! cria brutalement Millennia, en coupant la magicienne. Et voilà où nous en sommes maintenant ! Tu crois vraiment que c'est possible de rester unis ? Tout cela parce que tu as retiré ta capuche ?
- Chère Millennia, je sais que beaucoup de choses se jouent en ce moment, reprit Meinarth. Peut-être que le groupe ne t'a pas reconnu à ta vraie valeur. Mais moi, je sais qui tu es. Je sais que ta place est ici, dans ce groupe, à condition que nous sachions utiliser tous tes talents. Je sais aussi que tu détestes les ordres, alors considère-moi dans un premier temps comme un guide. Je te laisserai la place qu'il te faudra."

Cela eut le mérite de clôturer la discussion, et surtout de faire taire la guerrière. Elle se recula elle aussi et sembla réfléchir dans son coin. Il se passa alors quelque chose de surprenant ; Navok prit la parole :
"J'ai beaucoup de pensées contradictoires en moi. Mais l'idée principale, c'est que je vais rester avec vous. Je sais que je suis là pour quelque chose. Et ce quelque chose, c'est d'avancer sur ce sujet. Par contre, j'ai trop de raisons contradictoires à dire. J'arrête là.
- Merci, Navok. Quelqu'un d'autre souhaite prendre la parole ?
- J'ai rejoint l'aventure, j'irai jusqu'au bout de mes capacités pour la mener à bien, expliqua Isara d'un air déterminé.
- C'est noté. Bienvenue dans la bande, commenta Meinarth."

Ce fut le moment choisi par Darek et Blagueur pour revenir dans le groupe. La discussion avait visiblement été houleuse, et ils ne semblaient pas tout à fait d'accord sur les suites à donner au discours de Meinarth. Ce fut le géant qui démarra :
"Bon, nous on veut bien rester. Mais on en a marre qu'on nous dise quoi faire ou quoi dire. On a l'impression d'être pris pour des gamins. Et on en a marre de celle-là, posa-t-il en désignant Millennia.
- Parce que vous croyez que j'arrive encore à supporter vos deux visages d'imbéciles ? Et vos blagues ridicules ?
- Nous, au moins, nous ne sommes pas détestés par l'intégralité du groupe ! ricana le petit homme.
- Du calme ! cria Dardomez. Ça suffit. Je pense que vous n'avez pas compris mon discours. Nous avons un objectif clair et précis : retrouver un inventaire complet afin de s'attaquer à celui ou celle qui est derrière la corruption du Monde, aujourd'hui. Vous avez tous la chance extraordinaire de participer à cette aventure, mais cela suppose de réussir à mettre son ego de côté et à balayer devant sa porte. Nous avons tous des défauts. Vous croyez être les plus puissants, les plus tristes, les plus féroces adversaires de vos ennemis ? Sachez que moi, et d'autres ici, ont affronté beaucoup plus puissants que nous tous réunis. Nous avons eu des camarades de combat beaucoup plus solides que nous, et ils sont tombés au combat. Nous ne sommes pas les plus forts, mais si nous nous unissons, nous pouvons vaincre. Il est temps de le comprendre. Si vous souhaitez quitter le groupe, libre à vous. Sachez que vous l'affaiblissez, et vous vous affaiblissez : vous ne serez jamais plus puissants qu'ici, avec nous tous."

Il y eut un nouveau silence. J'étais, pour ma part, bien surpris par la dernière sortie de mon vieil ami. J'en avais perdu l'habitude. Je le trouvais plus assagi, peut-être plus doux, mais je voyais désormais qu'il n'avait pas tout à fait perdu sa fougue d'antan. Et c'était tant mieux pour le groupe. Il était temps que quelqu'un mette un terme à nos querelles internes. Nous avions déjà deux morts parmi notre faible groupe d'aventuriers, et nous savions qu'il était bien peu probable d'avoir des recrues dans une mission aussi dangereuse. Il fallait ajouter à cela les départ des anciens, Montery, Kyorn et Polgaraa, qui avaient considérablement affaibli notre maigre expérience de combat. Ceux qui restaient étaient certes de valeureux guerriers, mais ils n'avaient pas vécu nos années de conflits face au Mal absolu. Dardomez avait tout à fait raison : si nous voulions vaincre, nous n'avions qu'une seule chance : être unis, comme nous l'avions été autrefois face à des adversaires beaucoup plus puissants que nous, mais moins stratèges.

"Nous voulons bien faire un effort, si tout le monde en fait.
- Merci Darek. J'ai bien compris que vous ne souhaitiez pas un chef grognon toujours sur votre dos. Je n'en suis pas un. Je serai votre guide, mais nous définirons les objectifs et les directions ensemble. Millennia, les conditions sont-elles réunies de ton côté ?
- Hmm... Moi non plus, je n'ai pas envie d'avoir fait tout ce chemin pour partir maintenant. Mais je ne veux plus que l'on m'insulte gratuitement.
- Ce n'est pas nous qui avions commencé.
- Peu importe ! coupa Meinarth. Ces conflits incessants appartiennent donc au passé. Maintenant, nous sommes un groupe, où tout le monde a son mot à dire. Qu'en dis-tu, Grisek ?
- Euh... Oui, oui, je suis d'accord.
- Très bien, j'espère que chacun d'entre vous pourra prendre la parole, même ceux qui se taisent habituellement. C'est très important. Andrethel, tu nous suis toujours ?
- Pourquoi, où allons-nous ?
- Je prends ça pour un oui. Sir, as-tu quelque chose à ajouter ?
- Non, tu l'as très bien fait. Je suis fier de marcher pour une cause et à vos côtés, Compagnons.
- Alors, maintenant que tout ça est réglé, remettons-nous en marche. Direction le Sud, vers Lerida, la prochaine ville au bout de cette piste. J'espère que nous trouverons d'autres informations sur cette Porte, où doit se trouver le prochain objet, une fois là-bas."

Nous reprîmes notre marche, longuement interrompue. J'étais fier, je savais que j'avais fait le bon choix. Nous allions enfin former une équipe. Je réalisai que c'était aussi cela qui m'avait manqué, qui m'avait empêché de compenser le départ de Polgaraa : le fait de me sentir absolument seul avec ma nostalgie. J'en venais presque à regretter les douloureux combats des Temps Anciens.
Non, nous avions du pain sur la planche, et au moins un ennemi à débusquer. Je me demandai bien ce qui nous attendait au Sud de ce continent... Où, malgré tous mes voyages, je n'avais encore jamais mis les pieds.